Après L’attente, La saison des pluies et Mauvaises herbes, voici le nouveau roman graphique de Keum Suk-Gendry-Kim. Comme toujours elle s’y met en scène pour creuser un thème en lien avec son pays la Corée. Cette fois-ci, elle se livre à une enquête tous azimuts sur le chef suprême de la Corée du Nord sous ce titre ironique : Mon ami Kim Jong-un.
Habitant l’île de Ganghwa avec mari français et chiens, l’autrice est en lien direct avec le territoire du Nord. L’île étant comme un trait d’union entre les 2 Corées. De ce fait, elle est aux premières loges pour entendre les tirs nord coréens, semble-t-il, quotidiens. L’atmosphère y est donc très anxiogène et
Keum Suk-Gendry-Kim gamberge beaucoup. Elle part donc à la rencontre aussi bien de personnalités médiatiques : journalistes et jusqu’à l’ancien président de Corée du Sud avec qui Kim Jong-un a fait une déclaration commune, comme un pas de chaque côté pour une réunification, bien éphémère cependant. Mais aussi des invisibles : un ami du demi-frère mystérieusement assassiné en plein aéroport en 2017 ou bien des transfuges vivant maintenant en Corée du Sud. Ces derniers ont un point commun : la peur pour leur sécurité.
Le tout donne un reportage original sur la famille de dictateurs et la vie quotidienne au Nord, mais aussi au Sud. Keum Suk-Gendry-Kim met, en effet, en parallèle les temporalités de Kim Jong-un et les siennes. On apprend ainsi que, baby boomer, elle « a été élevée dans la haine du communisme », comme tous les enfants à l’époque des dictatures sud-coréennes (de 1953 à 1987).
Le dessin reste simple, coloré, ça-et-là, de bleu ou de violet. Pas de cadre le plus souvent, ce qui donne une composition très aérée, bien que dense. Plusieurs paysages rappellent les peintures chinoises anciennes. Ils sont très foisonnants alors que les situations quotidiennes, interviews pour la plupart sont très posées voire minimalistes.
L’autrice montre bien que plus de 70 ans après la fin de la guerre de Corée, les tensions persistent et la réunification n’est pas pour demain. Ainsi, mieux vaut être philosophe, comme ce Français vivant depuis plus de 20 ans en Corée en ignorant le danger : « Tant qu’à vivre ici, mieux vaut ne pas penser à la guerre ».
Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON
(1) Lire nos chroniques :https://asiexpo.fr/lattente-une-famille-coreenne-brisee-par-la-partition-du-pays-recit-et-dessin-de-keum-suk-gendry-kim/
https://asiexpo.fr/la-saison-des-pluies-recit-et-dessin-de-keum-suk-gendry-kim/ ethttps://asiexpo.fr/mauvaises-herbes-recit-et-dessin-de-keum-suk-gendry-kim-est-reedite-chez-futuropolis/
Mon ami Kim Jong-un, récit et dessin de Keum Suk-Gendry-Kim, 288 p. En noir et blanc, 19,5 X 26,5 cm, 30€, éd. Futuropolis. En librairie le 15 janvier 2025.