Sorti en catimini dans les salles obscures face au blockbuster mastodonte “Another Public Enemy”, “Marathon” a été LE succès surprise en Corée, arrivant troisième au box-office coréen 2005 (1,5 M d’entrées uniquement à Séoul et plus de 5 M au niveau national).
Hur Jin-ho et sa neige d’avril a fait fondre 800 000 fans en Corée et beaucoup plus en Asie, notamment au Japon.
D’un côté un autiste qui adore le chocolat, les zèbres et la course à pied, de l’autre, un couple coupé de la réalité et un autre qui se la joue “In the mood for love”.
Entre les deux notre coeur ne balance pas, … et le vôtre ?
MARATHON
de Chung Yoon-chul (Corée du sud, 2005, 117’, vostf) SORTIE le 26 avril 2006
avec Cho Seung-woo, Kim Mi-sook, Lee Ki-young, Baek Sung-hyun
HUR Jin-ho aime à donner à ses histoires d’amour un certain sursis, faisant planer l’épée de Damoclès au-dessus des têtes de ses protagonistes pour accentuer une notion d’urgence et l’embrasement de leur passion. Il en allait ainsi dans le magnifique “Christmas in August”, où le personnage se savait condamné dans un plus ou moins proche avenir, comme dans le second “One Fine Spring Day”. Dans le présent film, le fragile équilibre amoureux risque à tout moment de basculer au réveil des conjoints plongés dans le coma. Enjeu énorme, HUR Jin-ho ne va malheureusement pas à l’encontre des archétypes, mais termine son film sur un dénouement attendu pour répondre aux exigences des fans du genre. Il en va ainsi depuis le succès d’estime de son premier film sur un marché local et – surtout – international, le cinéaste se sentant “obligé” de répondre à certains poncifs pour assurer un certain succès commercial ; sentiment d’autant plus renforcé par la présence au casting de la vedette BAE Yong-joon. Véritable star du petit écran suite au succès de sa série “Winter Sonate” et de sa participation remarquée à l’excellente adaptation coréenne des “Liaisons Dangereuses” : “Untold Scandal”. Il est autant adulé dans son pays d’origine, qu’au Japon, où il est célébré comme “Yon-Sama”. Au vu de son actuel statut, impossible de briser l’image publique au risque de décevoir ses fans et de le faire tomber en disgrâce. Une vision occidentalisée fait certes fi de son influent vedettariat, mais se dégage de sa personne un certain style de perfection, qui se retrouve jusque dans sa chevelure impeccablement coiffée et l’éclatante blancheur de ses dents. Sa parfaite image de mannequin va malheureusement de pair avec son jeu, trop effacé pour exprimer toute la douleur et la rage nécessaires à son rôle. Il en affecte même la composition de son excellente partenaire SON Ye-jin, jamais aussi magistrale que dans les quelques rares moments seule à l’écran.
Mélodrame inabouti, aux curieux accents de film français du genre (l’histoire d’une infidélité et d’une rencontre, la manière de filmer silences et étreintes amoureuses), la puérilité du propos et l’écrasante notoriété de son principal acteur – mal choisi pour apparaître dans cette histoire qui se serait voulue plus anodine – font rater le coche au réalisateur ; même si cette œuvre se place toujours largement au-dessus du lot des productions (américaines) autrement plus niaises à abonder les écrans français par ailleurs !
Reste la tardive découverte française d’un cinéaste autrement mieux inspiré sur ces deux précédents longs métrages, dont les futurs pas seront tout de même à surveiller de près, tant le relatif échec du présent mélodrame ne doit en aucun cas cacher son talent certain à peindre ses personnages avec une rare tendresse et sensibilité.
Mars 2006
Pays : Corée du Sud