En décembre 2020, la Chine voit apparaître un nouveau virus : la Covid-19. Il est circonscrit à la région de Wuhan dans un premier temps. Forte de ses expériences précédentes, celle du Sars Cov-1 en 2002 et 2004 puis celle du Mers en 2014, les autorités réagissent autoritairement pour limiter sa portée. De plus, beaucoup de scientifiques, se fiant à leur expérience, pensent qu’il ne s’étendra pas au-delà de l’Asie.
Toutefois, c’est sans compter le haut degré de contamination du nouveau virus. Très vite, il se propage dans le monde entier et devient, par la même, une pandémie. C’est alors que chaque pays réagit différemment selon sa culture et surtout selon sa conception de la médecine.
La Chine, elle, ferme aussitôt ses frontières et confine strictement des villes entières avec la doctrine délirante du « Zéro Covid ». Ce qu’elle regrettera. À cause de cette contrainte contre-productive, elle limite grandement l’immunité collective. Peut-être a-t-il manqué à l’empire du milieu un outil que le docteur Martin Blachier et son associé Henry Leleu avaient conçu juste avant la propagation de la Covid-19.
C’est le point de départ de l’auteur : médecin spécialiste en santé publique, statisticien et épidémiologiste. Il met au point, avec son associé, des méthodes de modélisation prédictives fondées sur les mathématiques au sein de leur entreprise Public Health Expertise. Dans son livre, Mega gâchis, il raconte ses déboires avec les autorités françaises. En effet, il leur a offert gratuitement son analyse des contaminations pour anticiper les décisions à prendre afin de lutter contre la pandémie et en venir à bout. Il se confronte alors à un mur d’ego et d’individualismes qui ne veulent pas remettre en cause leur pouvoir. Tandis que la maladie fait des ravages dans la population à risque. Sans parler de l’enfermement de toute un pays sans justification avérée, notamment pour les jeunes.
Il change alors d’approche, s’adresse directement aux médias. Et là, bingo ! On l’écoute et on le critique aussi. C’est le moins qu’on puisse dire… Il remet en cause toute la stratégie anti-covid de notre pays qui s’est avérée contre-productive selon ses propres analyses.
Non seulement, il s’oppose aux mandarins de la médecine, mais il révèle, en plus, toute l’ineptie du conseil scientifique. Toutefois, ses efforts ne sont pas vains. Il finit par être entendu dans les sphères du pouvoir. Cela infléchit, un peu, trop peu à son goût, la politique de santé. En effet, au sein du gouvernement, il retrouve les mêmes antagonismes de personnes que dans son domaine.
Martin Blachier met très bien en évidence que les intrigues de pouvoir tant en médecine qu’en politique prennent le pas sur les stratégies scientifiques spécifiques à la maladie à traiter. Un point de vue salutaire.
Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON
Mega gâchis, Histoire secrète de la pandémie, Martin Blachier, 192 p., 18€, éd. du Cerf. En librairie le 10 mars 2022.