Deux ouvrages reprennent les événements d’avril à juin 1989 à Pékin. Suite au décès subit de Hu Yaobang, dignitaire du PC chinois mis sur la touche, mais protecteur des intellectuels, la jeunesse pékinoise lui rend hommage place Tian An Men, le 16 avril. Parallèlement, les étudiants font émerger 7 revendications pour éradiquer la corruption dans la vie politique et organiser de véritables élections démocratiques. L’enterrement a lieu le 19 avril et c’est l’amorce d’un mouvement de fond de toute la jeunesse estudiantine qui submerge Pékin. Les dirigeants refusent tout dialogue. Mais, à partir du 13 mai une grève de la faim est organisée sur la place occupée par les étudiants. Face à l’ampleur du phénomène, les autorités font mine d’amorcer les pourparlers. Puis, le 20 mai, elles décrètent la loi martiale. Malgré l’érection de la déesse de la démocratie le 30 mai, les chars font table rase de toute opposition dans la nuit du 3 au 4 juin.
Pour commémorer le 30è anniversaire du « Printemps de Pékin », 2 ouvrages se distinguent.
Eric Meyer, journaliste indépendant et écrivain, installé à Pékin depuis 1987 a vécu les événements sur place pour son travail. Dans son essai extrêmement bien documenté, puissamment référencé, il analyse avec acuité et perspicacité toutes les subtilités de la confrontation entre la jeunesse et « le gang aux cheveux blancs » comme les Chinois surnommaient les dirigeants. Il met en lumière les guéguerres intestines des différents clans qui mènent le pays. Elles expliquent, par exemple, pourquoi, à la veille de la loi martiale, Zhao Ziyang, seul réformateur du régime, est arrêté et mis en résidence surveillée. D’un commun accord, les conservateurs outrepassent alors les réticences des certains haut-gradés et décident de clore la comédie en envoyant les tanks.
Lun Zhang vit aujourd’hui en France. En 1989, il était jeune professeur de sociologie à Pékin. Mais surtout, lors des événements, aux côtés des étudiants, il était chargé du service d’ordre sur la place Tian An Men. A l’aide du sinologue et journaliste Adrien Gombeaud et des dessins d’Améziane, il nous plonge au cœur de l’occupation estudiantine du printemps de Pékin. Avec pédagogie, il explique la succession des événements aussi euphoriques que tragiques pour l’instauration de la démocratie en Chine. Car c’était bien le but de cette jeunesse pacifique.
Deux points de vue complémentaires pour comprendre en profondeur des événements passés sous silence par le régime chinois pendant ces 30 ans.
Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON
Pékin, Place Tian An Men, essai, Eric Meyer, réédition, Babel, Actes Sud, 336 pages, 8,90€. Paru le 13 mars 2019.
Tiananman 1989, nos espoirs brisés Lun Zhang, Adrien Gombeaud et Améziane, Seuil Delcourt, 112 pages, 17,95€.