Rétrospective Akira Kurosawa, 2ème vague en salles à partir du 25 janvier.

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Carlotta poursuit sa distribution de films rares de Kurosawa avec 8 de ses œuvres dont 2 inédites, pour la 1ère fois au cinéma en version restaurée par Wild Side et la Toho (lire ma chronique ciné du 2 mars 2016), comme en mars dernier.

Le 1er inédit est le 2ème long métrage de Kurosawa : Le plus dignement, de 1944. Il rend hommage aux femmes japonaises et à leur courage en temps de guerre. Le cinéaste, comme les autres, doit participer à l’effort de guerre contre les Alliés et réalise ce film de propagande tout en y apposant délicatement sa touche personnelle, notamment par son choix de tourner dans un style semi-documentaire. L’œuvre est donc à remettre dans son contexte « guerrier » pour être appréciée…

Le 2ème inédit est Un merveilleux dimanche, de 1947, le 6ème film de Kurosawa. Dans un style mêlant réalisme et lyrisme, il s’agit d’une chronique sociale bouleversante sur un Tokyo en pleine reconstruction, à travers le couple de Yuzo et Masako. On pense à Allemagne, année zéro de Roberto Rossellini et à la grande veine néoréaliste. On y ajoute une part de rêve, celle qui fait tenir Yuzo, le héros du film et qui lui donne finalement son optimisme !

En 1948, L’Ange ivre révèle Toshiro Mifume, son acteur fétiche, avec lequel il tournera seize films ; et le style même de Kurosawa. « L’Ange ivre est le premier film que j’ai dirigé qui soit libéré de toute contrainte extérieure. Dans cette oeuvre, j’ai investi tout mon être. Dès la phase de préparation, j’ai senti que j’étais en train de me mouvoir sur le terrain qui me convenait. » soutient le cinéaste. Le succès du film lance sa carrière et celle de Mifume. Suit Chien enragé un film noir admirable à l’atmosphère oppressante qui met à mal les travers de la société japonaises.

Vivre renoue plutôt avec le mélodrame social et la fable humaniste. Kurosawwa y dresse le portrait d’un vieil homme, fonctionnaire qui apprend à vivre au moment où il découvre sa mort prochaine. L’acteur Takashi Shimura, que Kurosawa fera tourner dans 21 de ses longs-métrages, fut d’ailleurs surnommé « le plus grand acteur du monde » à la suite de ce film, qui a, d’ailleurs, la réputation d’être un chef d’œuvre !

Avec les 3 dernières ressorties, Kurosawa nous plonge dans un Japon plus ancien.

Lauréat de l’Ours d’Or au Festival de Berlin de 1959, La Forteresse cachée prouve la grandeur de ce récit à grand spectacle qui, bien que situé dans le Japon féodal, n’en garde pas moins un caractère universel – George Lucas dit avoir trouvé dans cette histoire une influence majeure pour sa saga mythique Star Wars.

Avec Sanjuro, Kurosawa revient au film de samouraïs (c’est la suite de Yojimbo), mais il s’amuse ici à le démythifier au profit de la comédie ; le constant décalage entre l’être et le paraître étant à l’origine de nombreuses scènes comiques ! Enfin, Barberousse est le deuxième volet de sa trilogie dite « de la misère », après Les Bas-Fonds (1957) et avant Dodes’ka-den (1970). Avec ce film-fleuve (plus de trois heures), Kurosawa voulait faire un chef d’œuvre en suivant le parcours initiatique de Yasumoto, jeune médecin contraint de travailler dans un dispensaire tenu par le Docteur Barberousse, figure christique du médecin, s’il en est. Il parvient à l’épanouissement personnel et professionnel à ses côtés. Pari réussi car c’est bien un chef-d’œuvre d’une délicatesse infinie à la mise en scène à la fois minutieuse et grandiose, ce film marque aussi la fin de sa collaboration avec son comédien fétiche, Toshiro Mifune.

Une partie d’une œuvre prolifique à découvrir et à redécouvrir assurément !

Camille DOUZELET

LE PLUS DIGNEMENT 1944 – inédit, UN MERVEILLEUX DIMANCHE 1947 – inédit, L’ANGE IVRE 1948, CHIEN ENRAGÉ 1949, VIVRE 1952,

LA FORTERESSE CACHÉE 1958, SANJURO 1962, BARBEROUSSE 1965.

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