Le Passe-Partout de Masako Togawa paraît chez Denoël.

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Publié en 1962 au Japon, ce roman noir est un grand classique du genre. Resté inédit en France, il nous plonge dans le Tokyo des années 50/60 à travers la résidence K. Il s’agit d’un manoir de briques rouges de 150 chambres pour femmes célibataires. Aucun homme n’a droit d’y séjourner.

Le titre Le Passe-Partout personnifie l’objet qui va passer de main en main et créer un suspense d’atmosphère haletant. En effet, il ouvre chacune des portes des résidentes. Et celles-ci, bien que d’apparence tout à fait tranquille et quelconque, ont chacune leur secret.

Les deux gardiennes d’abord, dont l’une somnole beaucoup et ne se souvient pas de grand-chose tandis que l’autre lit à longueur de journée. Ishiyama Noriko, ensuite, surnommée, « Madame algues ». Ancienne professeure d’arts plastiques en école primaire, elle ne vit maintenant que de l’aide sociale et chaparde quelque peu. Ou encore Yatabe Suwa, la professeure de violon à la retraite, qui n’arrive pas à raccrocher. Et puis Kimura Yoneko, professeure elle aussi à la retraite, qui pour remplir le vide de sa nouvelle vie, envoie des lettres à ses anciennes élèves. C’est elle qui va mener son enquête sur l’enlèvement, 7 ans plus tôt, d’un petit métis de 4 ans, fils d’une de ses anciennes élèves justement et d’un soldat américain.

Le cadre étant posé, il faut ajouter aussi que la résidence K va être déplacée. Le roman s’écrit alors comme un compte à rebours par rapport à cet événement qui pourrait aussi faire ressurgir les secrets enfouis du passé.

D’une écriture à la fois épurée et poétique, Masako Togawa décrit l’humble quotidien de ces résidentes, leur résilience face à une réalité difficile : la pauvreté, l’ambition fracassée, la croyance illusoire et surtout l’extrême solitude.

À travers ce thriller aussi labyrinthique que la résidence K, l’autrice décédée en 2016 et très reconnue au Japon pour ses romans noirs, nous délecte absolument. De fausses pistes en allers retours temporels, elle nous conte la vie des femmes.

À quand la prochaine traduction d’un nouvel opus de Masako Togawa ?

Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON

Le Passe-Partout de Masako Togawa, roman traduit du japonais par Sophie Refle, 172 p.,19 €, éd. Denoël / Sueurs Froides. En librairie le 15 février.

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