Jusqu’à la fin des années 1980, il y avait deux façons pour un Chinois de voir des documentaires : soit à la télévision sur les quelques chaînes disponibles ou bien au cinéma en première partie d’un film à l’affiche.
Pour le circuit des salles de cinéma, les principaux producteurs de documentaires étaient deux studios de Pékin : “les studios de cinéma des nouvelles de Chine” et “les studios de cinéma de l’éducation scientifique de Pékin”. Les documentaires diffusés à la télévision étaient, quant à eux, principalement réalisés par “la chaîne centrale de télévision” (CCTV). Ces institutions étaient clairement teintées d’un caractère étatique, et la plupart des documentaires proposés reflétaient la mentalité et la couleur politiques, à travers la propagande, et étaient des chroniques historiques ou des films sur les techniques et métiers.
En 1988, le journaliste Wenguang Wu, originaire de la province du Yunnan arrive à Pékin et entre dans une équipe de CCTV pour faire des “films à thème”*. Lorsqu’il a du temps libre, il utilise le matériel de CCTV pour braquer son objectif sur l’histoire de cinq jeunes vivant à Pékin, avec des situations plus ou moins heureuses, analogues à la sienne. Parmi ces personnes il y avait notamment un peintre, un réalisateur de drames expérimentaux, un écrivain, et un photographe indépendant. Wenguang Wu filme caméra à l’épaule avec une grande sincérité leur vie, leurs sentiments et contradictions, la narration est ponctuée de plans-séquences et il utilise la synchronisation sonore. “Bumming in Beijing” marque un réel contraste autant par le thème que par la forme avec les autres documentaires, il bouscule toutes les convenances et suggère une sensation d’authenticité peu éprouvée jusqu’alors.
Le mouvement des nouveaux documentaires en Chine n’a pas engendré de grands principes directeurs et n’a pas constitué de regroupements. De mon point de vue, il ne représente qu’une attitude créatrice, relativement indépendante par rapport aux positions du gouvernement. Les réalisateurs en filmant le peuple au quotidien, cherchent à entretenir une certaine indépendance d’esprit, non seulement la leur mais aussi celle de leurs spectateurs. Garder cet esprit s’avère un gage peu commun et difficile dans un pays où le pouvoir est très centralisé. Une autre caractéristique de ce mouvement est que la grande majorité des réalisateurs sont issus du système. C’est ce dernier qui leur a fournit les ressources et le matériel : des caméras (Beta cam) jusqu’au montage. A partir de 2000, la caméra DV est devenue plus courante en Chine, réaliser et monter un film est devenu beaucoup plus aisé, et les contraintes de moins en moins importantes. Et une nouvelle vague de cinéastes est apparue.
* On appelait “films à thème” les documentaires qui étaient filmés par des fonctionnaires ou par les autorités. Puis l’appelation “documentaire”, dès 1990, est devenue plus répandue en langue chinoise.
Texte écrit en chinois : Jiayin Wang
Traduction : Julien Marilier
mars 2009
Pays : Chine