Que dire du nouveau roman policier, Le fil de l’espoir, de Keigo Higashino ? Tout d’abord qu’il fourmille de personnages d’une grande humanité. Ensuite qu’un formidable entrecroisement de destins va unir ou éloigner chacun des protagonistes de façon inattendue. Enfin, qu’un meurtre a bien été commis, mais presque par inadvertance. Par erreur serions-nous tentés d’avancer.
Nous retrouvons ainsi Kaga et Matsumiya, les deux cousins policiers que nous avons déjà croisés à maintes reprises (1). Ils mènent une enquête minutieuse sur le meurtre d’une paisible propriétaire de maison de thé.
Toutefois, pour l’auteur, l’investigation policière sert avant tout à dévoiler les nombreuses zones d’ombre des relations familiales plutôt qu’à élucider le meurtre. Il le sera tout de même de main de maître.
Les révélations sont presque arrachées aux témoins grâce à la perspicacité des policiers. C’est notamment le cas pour Matsumiya qui ne se contente pas de savoir qui est à l’origine du crime. Le plus important à ses yeux est de pousser chacun pour qu’il lui révèle des faits pas forcément nécessaires à l’enquête. Il les contraint à divulguer des aspects de leur vie qu’ils n’osent pas s’avouer. Il les piste jusque dans leurs retranchements les plus intimes bien qu’ils n’aient pas envie de le suivre sur ce terrain-là.
Il n’agit pas ainsi par voyeurisme. Loin de lui une telle tare ! Il est lui-même emporté par des révélations familiales auxquelles il n’est pas préparé. Le doute et un questionnement irrépressible l’assaillent. Il doit aussi résoudre ses propres mystères familiaux.
Sa ténacité conjuguée à la motivation de son cousin finissent par rompre toutes les barrières érigées par les personnes interrogées.
L’auteur, par son récit très construit et hautement maîtrisé, narre avec un sens peu commun pour un roman policier, un ensemble de révélations aussi inattendues qu’éloignées de l’enquête.
Il met en relief le problème créé par le manque et l’absence de communication entre les différents protagonistes dans un jeu de pistes sans cesse réinventé. Chaque révélation entraîne d’autres mystères à résoudre.
Un coup de chapeau à la traductrice, Sophie Refle, qui parvient, au travers de ses nombreuses traductions de romans de Keigo Higashino, à restituer avec brio toute la retenue et la tension de la société nippone.
Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON
(1) lire nos chroniques de ses romans chez actes noirs : https://asiexpo.fr/le-cygne-et-la-chauve-souris-de-keigo-higashino-parait-chez-actes-sud/ ; https://asiexpo.fr/les-sept-divinites-du-bonheur-de-keigo-higashino-parait-chez-actes-sud/ ; https://asiexpo.fr/le-nouveau-de-keigo-higashino-parait-chez-actes-sud/ ; https://asiexpo.fr/la-lumiere-de-la-nuit-de-keigo-higashino/ ; https://asiexpo.fr/les-doigts-rouges-de-keigo-higashino-sort-chez-actes-sud/
Le fil de l’espoir de Keigo Higashino, roman traduit du japonais par Sophie Refle, 368 pages, 23 €, coll. Actes noirs, éd. Actes Sud.