La Corée du Sud en 100 questions, la tyrannie de l’excellence, de Juliette Morillot paraît chez Tallandier.

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Voilà un essai peu banal. Non dans la forme de ses 100 questions sur la Corée du Sud (1), mais par la pertinence des réponses à celles-ci. Jamais un lecteur occidental n’a eu accès à une telle somme d’informations aussi pertinentes sur ce pays. En six denses chapitres, Juliette Morillot nous immerge avec simplicité et pédagogie dans le culture pluriséculaire du « Pays du Matin Clair ». Par la perspicacité de son propos, elle nous éclaire sur de nombreux us et coutumes spécifiques des habitants de la péninsule néoconfucianiste.

En tête d’ouvrage, l’autrice a la bonne idée de nous restituer l’histoire et la géographie de la Corée (tout le territoire et de toutes les époques). Cela permet au lecteur de mieux se situer dans la multiplicité des évènements développés à chaque étape. Comme souvent, le « Pays du Matin Clair » émerge de la mythologie. Très vite, cependant, divers royaumes s’opposent entre eux pour en devenir les maîtres. Notamment, celui de Goguryeo (37av. J.-C.- 668) qui déborde très largement sur la Chine. Cependant, c’est surtout le royaume de Silla qui unifie la péninsule au prix d’une sévère amputation de son territoire au profit de l’empire des Liao.

Très vite et tout au long de l’ouvrage, le lecteur prend conscience de la fragilité de ce pays. De tout temps, Il est la proie de ses puissants voisins : la Chine et le Japon, puis au XXe siècle, les USA et l’URSS. Un proverbe coréen d’ailleurs l’annonce clairement : « Quand les baleines se battent, les crevettes ont le dos rompu. »

Malgré les nombreuses épreuves (guerres, occupations, dictatures, etc…), la Corée du Sud parviendra à instaurer la démocratie au prix d’immenses sacrifices de la part de ses habitants. Ce qui débouche sur le soft power actuel mis en place par Kim Dea-jung arrivé au pouvoir en 1988.

Toutefois, si la Corée du Sud se porte bien à l’international, très bien même, intérieurement, de plus en plus de problèmes fragmentent l’ordonnancement ancestral de la société. L’individualisme à l’occidentale tend à détruire la structure clanique des origines. Les genres s’opposent radicalement. Les plus jeunes considèrent l’école comme l’antichambre de l’enfer qu’est devenu leur pays. Sans même parler des humiliations au travail (gapjil : syndrome de la toute puissance) ou de l’abandon des personnes âgées.

Édifiant ouvrage, donc, que nous propose Juliette Morillot. La lecture en est aisée et fluide. Surtout elle nous incite à tourner les pages au fur et à mesure que nos connaissances s’affinent, tel un livre à suspens. On ne se lasse pas d’approfondir toute la spécificité de ce peuple. D’ailleurs, il gagne plus à être connu dans sa dimension civilisationnelle que comme moteur d’une culture mondialisée.

Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON

(1) C’est le titre même de la collection créée par François-Guillaume Lorrain chez Tallandier.

La Corée du Sud en 100 questions, la tyrannie de l’excellence, 416 pages, 19,90€, Juliette Morillot, éd. Tallandier.

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