Les qualités de cet ouvrage sont très bien identifiées par les traducteurs dans leur avant-propos. On est ici convié à un voyage cinéphilique dans le cinéma fantastique, et un des principaux intérêts du livre est de nous dévoiler quel pouvait être le parcours initiatique d’un fan nippon, bien avant internet et les DVD. Celui-ci était bercé de classiques japonais encore difficiles à trouver en Occident, tandis qu’à l’inverse les incontournables européens ou américains lui étaient inaccessibles, et qu’il devait souvent se contenter de les fantasmer. Si l’on ajoute à cela les différences de culture et de référence, on obtient une vision très instructive du décalage pouvant exister dans l’appréhension d’une œuvre par un fan japonais ou occidental.
Cette approche “sociologique” du cinéma, que l’on saisit au fur et à mesure de la lecture, est l’attrait principal du livre. Pour le reste, il faut préciser quelques points. Tout d’abord, il ne s’agit pas ici du cinéma de Kurosawa, mais du cinéma fantastique par Kurosawa. Même si des relations sont mises en évidence, celles-ci restent la plupart du temps superficielles, et l’on n’apprend rien de majeur sur le travail du cinéaste. Il n’est pas question non plus de décortiquer le genre, mais plus d’une flânerie d’un titre à un autre. Enfin, il s’agit d’entretiens, donc d’une discussion, avec Shinozaki, lui-même critique de cinéma et réalisateur. Si cet aspect est censé donner un côté plus dynamique à l’ensemble, on constate vite que l’intervieweur a tendance à voler la vedette à l’interviewé, et que (est-ce dû aux particularités du discours japonais ?) la conversation donne parfois l’impression d’un dialogue de sourds, les deux intervenants ne se répondant pas vraiment… Ceci dit, même si l’ensemble est léger, l’amateur de cinéma fantastique passera lors de ce voyage un agréable moment en compagnie des deux cinéastes, à évoquer avec passion les classiques du genre.
Éditeur : Rouge Profond
Pays : Japon