L’amie de la narratrice Gyeongha : Inseon, la fait venir à l’hôpital, à la suite d’un accident grave. Elle lui confie alors une mission qui peut paraître puérile au premier abord. En effet, elle lui demande de se rendre chez elle sur l’île de Jeju en Corée du Sud pour s’occuper de son oiseau en cage. Gyeongha accepte, bien qu’un peu perplexe.
Sans attendre elle prend l’avion. L’oiseau risque de mourir de déshydratation si personne n’intervient promptement. Après de nombreuses péripéties à cause d’une forte tempête de neige sur place, notamment, elle parvient à rejoindre l’habitation pour s’acquitter de sa délicate mission. Cependant, elle se trouve bloquée à cause du mauvais temps. Aussi, elle s’attelle à la lecture des archives de la famille de son amie. Que ne découvre-t-elle pas ?
Fin 1948-début 1949, une partie du village des parents d’Inseon est détruite. La moitié des habitants sont massacrés, dont ses propres parents, par l’armée et la police, comme trente mille civils accusés d’être des communistes.
Gyeongha retrouve là le thème du roman qu’elle vient de publier avant de retrouver son amie. Sans doute, n’est-ce pas là un hasard. Si le récit s’ouvre en pointillé sur ce thème tragique, il se referme beaucoup plus brutalement dessus.
L’amitié entre les deux femmes constitue le socle du livre. Le voyage de Gyeongha se mue en initiation à l’histoire familiale de son amie. Il leur permet de renouer les liens distendus entre elles par de nombreuses années de séparation. En effet, pendant près de dix ans, ensemble, elles ont sillonné l’Asie en quête de reportage. L’une comme rédactrice l’autre comme photographe ou camerawoman.
Par une écriture très méticuleuse, l’autrice nous entraîne dans des évènements à la temporalité bien souvent flottante. L’imaginaire de Hang Kang plonge le lecteur au cœur du malaise de Gyeongha. D’autant qu’elle-même, ne sait pas toujours si elle vit sa vie ou si elle s’enfonce dans un cauchemar. Si bien qu’elle en vient à rédiger son testament.
Les nombreuses péripéties ainsi que les époques imbriquées rendent très mystérieux le récit pour un lecteur occidental. Il faut faire un indéniable effort pour accepter de se laisser happer par si peu de certitudes. Peut-être le livre veut-il tout simplement nous dire que nous ne sommes, après tout, que des êtres éphémères avec seulement quelques repères dans nos vies. Le reste de notre vécu se dissout dans le néant du temps.
Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON
Impossibles Adieux, Hang Kang, 336 pages, 22€, coll. En lettres d’ancre, éd. Grasset.