Quelle est l’origine du projet Anayi ?
Je suis issue des minorités Miao et Tong. Face à l’impact de la nouvelle économie chinoise, le patrimoine culturel de ces deux ethnies risque de disparaître. Il n’appartient pas seulement aux Miao et aux Tong, mais à toute la Chine, et au monde. En réalisant ce film, je souhaite sensibiliser le public.
La conception du scénario a commencé en 1999 alors que j’avais 16 ans. Pour repérer les lieux de tournage, pendant 5 ans, j’ai exploré mon pays. Beaucoup ne sont pas accessibles par la route. Il faut marcher à pied deux ou trois heures pour y arriver. Après la diffusion du film dans la région, il y a même des spectateurs qui m’ont dit qu’ils avaient été frappés par la beauté de leurs villages vus à travers la caméra. Ils ne font apparemment pas assez attention à leur propre environnement (rires).
Quelle est la réaction des populations concernées par ce film ?
Après sa sortie, nous avions décidé de le montrer là où nous avions tourné. Comme la région est très montagneuse et qu’il est difficile d’accéder aux différents villages, nous n’avions prévu qu’une courte période de diffusion d’une semaine. Mais au-delà de nos attentes, beaucoup de villageois ont fait de très longs déplacements pour voir le film. C’était la première fois qu’ils voyaient leurs villages sur grand écran. Il y a même des spectateurs qui ont vu le film deux ou trois fois. Finalement la diffusion s’est prolongée pendant 18 jours. Grâce au film, je suis devenue une sorte de héroïne dans la région. Cela me gêne et je pense que je dois faire plus pour eux pour les remercier de leur soutien. Je suis comme un cerf-volant, qui s’est envolé en-dehors de ses montagnes, mais un fil me rattache toujours à ces lieux.
Quel est votre sentiment de montrer votre premier film à Paris ?
Je suis très heureuse d’avoir été sélectionnée par les organisateurs du Festival du cinéma chinois de Paris. Malgré la différence de langue et de coutumes entre les Miaos ou les Tongs et les Français, j’espère que grâce aux chansons et à l’amour, ces langages universels, le public français appréciera mon film et si possible, qu’un distributeur acceptera de le sortir en France.
Mon prochain film est lié aussi à la France. La relation entre la France et ma ville natale Guizhou date du XIXe siècle. En 1863, il y avait déjà des missionnaires occidentaux à Guizhou. On trouve encore des églises de cette époque loin dans les montagnes de cette région. Les missionnaires ont laissé pas mal d’histoires intéressantes là-bas. J’aborderai des sujets comme la différence culturelle entre l’Orient et l’Occident, et comment les peuples des deux côtés peuvent vivre ensemble en harmonie.
interview réalisée dans le cadre du 3e festival du cinéma chinois de Paris (septembre 2007)
voir aussi la chronique sur Anayi dans CHRONIQUES CINEMA
Pays : Chine