Ames sensibles s’abstenir. Sono Sion s’est inspiré de la recrudescence des suicides liés à certains sites internet communautaires. Les médias au Japon et au-delà ont en effet pointé cette curieuse vague de suicides comme une dérive de la société contemporaine nipponne.
Deux films réalisés par Sono Sion illustrent ainsi ce phénomène de société que le réalisateur qualifiera même de “phénomène de mode”.
Le plus déjanté des deux longs métrages est Suicide Club (2002). Un groupe de lycéennes se jette sans raison sous un train. D’autres suicides collectifs suivront. Cette série de décès brutaux fait l’objet d’une enquête de police. Mais les inspecteurs sont dépassés par des événements dont la fréquence et la violence dépassent l’entendement. C’est justement le déchaînement de violence visuelle et psychologique qui caractérise Suicide Club. D’ailleurs le scénario rocambolesque est à la fois déjanté et déroutant. Suicide Club 0 (Noriko’s dinner table) sorti en 2005 permet de nombreux éclaircissements à celui qui n’a pas été totalement dégoûté de Suicide Club. Ce long métrage est sans doute plus abordable du fait d’une trame narrative plus facile à suivre. Suicide Club souffre (même si cela fait partie de son “charme”) d’une chronologie quelque peu tarabiscotée.
Dans Suicide Club 0, le spectateur suit Noriko en images et en voix off. Une adolescente qui se sent mal. Elle ne supporte plus le milieu familial qu’elle quitte peu après avoir intégré une communauté cybernétique. Suite à sa fugue, on apprend dans les journaux qu’une cinquantaine de jeunes filles se sont retrouvées sur un même quai de gare avant de se jeter sous un train. Noriko en faisait-elle partie ? Le film est alors la succession narrative de la culpabilité de son père puis des recherches de sa jeune sœur Yuka.
Le spectateur qui a survécu à Suicide Club aura, entre autres, le plaisir de revoir la scène du suicide collectif de la gare. Mais Suicide Club 0 ménage davantage le public. La psychologie des personnages n’est pas entachée des litres de sang du premier film. A vrai dire, on y voit plus clair. On comprend bien la critique que Sono Sion adresse à la société.
Son interview et l’exposé (plus qu’un véritable documentaire) “Au pays du suicide” réalisés par Julien Sévéon enrichissent utilement le coffret. Sans adoucir notre perception du suicide, les informations distillées permettent d’adopter un regard moins occidentalo-centré et donc plus juste sur le phénomène du suicide japonais.
Éditeur : Kubik Vidéo
Pays : Japon