Le ciel ne parle pas de Morgan Sportès sort chez Fayard.

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En 1640, sur la presqu’île de Nishizaka, près de Nagasaki, le Shogun Iémitsu fait exécuter quatre ambassadeurs portugais et leur suite venus de Macao pour réinstaurer de nouvelles relations commerciales avec l’empire des Tokugawa. Cet événement marque la fin du siècle chrétien du Japon. En effet, depuis une centaine d’années, les Portugais cherchaient à christianiser le Japon. Par vagues successives, des prêtres comme le héros du roman : Christavao Ferreira, jeune Jésuite portugais plein de ferveur chrétienne, se trouvaient confrontés à la dure réalité de l’accueil nippon à cette « religion barbare ». Après plus d’une dizaine d’années de clandestinité, Ferreira est soumis au supplice de la fosse et finit par apostasier. Il va même jusqu’à écrire un pamphlet contre la religion chrétienne et est employé par l’Inquisition japonaise pour démasquer les chrétiens portugais ou nippons. C’est ce retournement que raconte le roman de Sportès.

Beau roman, bien documenté, bien construit avec des notes biographiques conséquentes. Bien qu’historique, le roman nous fait vivre tous les affres de ces utopistes qui cherchèrent à apporter la « vraie foi » sur ces terres païennes. On voit bien comment Ferreira, au contact de la réalité, perçoit sa religion comme fausse, en tout cas pas meilleure que celle des Japonais. Le roman laisse sous-entendre qu’il n’y a pas de transcendance, que l’homme est face à lui-même et doit décider seul de son sort. Ferreira devient le personnage central, tandis qu’il n’était que le fil rouge dans le film de Martin Scorsese : Silence, sur le même sujet. Sportès mêle deux voix narratives. Il y a celle de Ferreira lui-même racontant son histoire à travers différents lieux où il a servi d’interprète et celle d’un narrateur contemporain, visitant ces différents lieux comme mémoire de la chrétienté au Japon. Cet entremêlement, un peu artificiel au début, permet de montrer les hauts lieux du christianisme japonais, marqués par le martyre.

 

Camille DOUZELET

 

Le ciel ne parle pas, Morgan Sportès, Fayard , octobre 2017, 20€.

 

 

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