Bollywood et les autres de Ophélie Wiel

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Bollywood et les autres est une invitation au voyage au coeur du cinéma indien d’hier, d’aujourd’hui et de demain. Avec près de mille films réalisés par an, l’Inde est aujourd’hui le premier producteur cinématographique au monde.

Comme le dit Ophélie Wiel dans son introduction, le cinéma indien, « on le condamne sans l’avoir vu, on le catalogue sans le connaitre, on le désigne par des adjectifs réducteurs et méprisants comme « kitsch » ou « irréaliste ». Pourtant, mettre en scène des personnages qui chantent et qui dansent dans des champs de fleurs a-t-il moins de sens que de montrer des héros masqués escaladant des immeubles sans filet ni corde ? ».
Bollywood et les autres s’adresse à tout un chacun, même à celui qui n’est pas féru de septième art indien. Le livre d’Ophélie Wiel s’attarde en effet à montrer le cinéma indien sous un nouvel angle.

Dès le titre, Ophélie Wiel livre aux lecteurs une information essentielle. Le cinéma indien, ce n’est pas le cinéma populaire de Bollywood, en tout cas, pas que. C’est aussi « les autres » : Kollywood, le cinéma en tamoul produit au Tamil Nadu, Tollywood, le cinéma bengali, etc.
Dans un pays à la diversité linguistique comparable à celle de l’Europe, chaque Etat, chaque langue presque, a son cinéma. Ce sont d’ailleurs les quatre Etats sudistes qui concentrent la majorité de la production avec 65% des films indiens tournés en tamoul, telougou, kannada et malayalam depuis les années 90. Des films plus ancrés dans la réalité de leur région que les films de Bollywood.
Mais pourquoi et comment le cinéma hindi est devenu le cinéma “national” indien ? Ophélie Wiel ne nous laisse pas sans réponse.

La formule dansée et chantée du cinéma indien trouve elle aussi sa justification dans cet ouvrage riche d’éclaircissements. Selon le traité Natyashastra, traité fondateur de l’art indien rédigé entre le IIe siècle avant JC et le IIe siècle de notre ère, et attribué au sage Bharata, dans le théâtre populaire, dont le cinéma est l’héritier, la musique et la danse doivent apparaitre lorsque les événements prennent une dimension extraordinaire.
De plus, la musique, dans ce pays multilingue, est un langage universel. Le pouvoir émotionnel de la mélodie dépasse souvent la valeur du texte chanté, permettant à un spectateur tamoul d’apprécier une chanson tirée d’un film en hindi.
On se sert également des passages dansés et chantés pour combattre la censure du baiser. On s’embrasse partout ailleurs que sur la bouche, on dévoile le corps des actrices et, sous prétexte de chorégraphies, les personnages osent les positions les plus suggestives.

Le film indien, c’est avant tout un spectacle. Il mêle toutes les formes artistiques possibles. Son objectif premier n’est pas le réalisme mais bel et bien le divertissement. Il doit en outre contenter tous les publics en leur offrant toutes les épices cinématographiques existantes (émotions et genres). Cette multitude d’épices explique la longueur des films commerciaux qui exposent plusieurs intrigues simultanément.

Bollywood et les autres balaie donc les clichés, et c’est tant mieux.

La carte des langues par état à la fin de l’ouvrage est, de surcroît, très appréciable.

Éditeur : Buchet Chastel

Pays : Inde

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