Aux confins oubliés de l’Inde de Olga et Arnaud de Turckheim

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Le récit d’Olga de Turckheim et les aquarelles de son mari Arnaud nous plongent au cœur des « Sept sœurs », ces états excentrés du Nord-Est indien fermés aux étrangers pendant plus de 40 ans et qui s’entrouvrent timidement. Pour traverser l’Assam, l’Arunachal Pradesh, le Nagaland, le Meghalaya, le Manipur, le Mizoram et le Tripura, cernés par le Bhoutan, le Tibet, le Bangladesh et la Birmanie, les visiteurs doivent avoir un permis de circuler. Les troubles engendrés par les querelles interethniques obligèrent les deux voyageurs à renoncer au Manipur, au Mizoram et au Tripura.

Aux confins de l’Inde, c’est cinq semaines de voyage à la rencontre de tribus aborigènes.
Les thèmes classiques, quand on parle de l’Inde, sont abordés : le thé, la religion, les croyances et les rites, les rizières, les langues et dialectes, le travail des enfants, les mariages arrangés, les fêtes et la danse.
Mais d’autres sujets enrichissent le récit comme l’environnement avec la construction de barrages, la déforestation et la culture sur brulis, le massacre d’animaux et la réserve de Kaziranga pour les animaux en voie de disparition dont le rhinocéros unicornes… Un sujet d’actualité auquel on peut y ajouter l’idolâtrie des stars et la géopolitique (conflits territoriaux qui attisent les rivalités des tribus).
Du côté de l’insolite, on peut citer la découverte du Meghalaya, la région la plus arrosée du monde lors de la mousson mais où il faut, le reste du temps, faire plusieurs kilomètres à pied chaque jour pour s’approvisionner en eau.
Les coutumes ne sont pas en reste : ainsi les femmes de l’ethnie Apatani qui étaient réputées pour leur beauté. On les défigurait dès l’enfance pour éviter qu’elles ne soient kidnappées par des tribus ennemies. Aujourd’hui, des rondelles de rotin noir enchâssées dans leurs narines transforment leur nez en groin de cochon.
Autrefois, au village de Longwa, nul ne pouvait se marier sans avoir prouvé son courage et sa virilité en chassant une tête ennemie. Depuis que la chasse à l’homme est interdite, des cranes et des cornes de mithun fichés sur des pieux totems ont remplacé les arbres à têtes. Les membres du conseil, quant à eux, fument l’opium de manière intensive, au point de menacer l’extinction d’une race.
On apprend également que, dans une autre tribu, le mari est adopté par son épouse et il est un visiteur de la nuit.
C’est au début des années 80 qu’Olga et Arnaud de Turckheim ont effectué leur premier voyage en Inde. Et comme le dit si bien la narratrice, « je suis amoureuse de l’Inde comme on peut l’être d’une personne dont on accepte les défauts pour mieux apprécier ses qualités ».
Les trajets très long entre chaque étape, « qui ne s’estime pas en kilométrage mais à l’aune de l’imprévisible », servent de fil conducteur au récit.
Des éléments historiques et des explications précises sont apportés mais l’on peut regretter la faible part accordé à la vie quotidienne des habitants.
Malgré tout, le récit de voyage associant texte et dessins d’Aux confins de l’Inde fonctionne, comme c’est souvent le cas, très bien. On est presque à regretter l’absence de sons et d’odeurs !

Éditeur : Actes Sud

Pays : Inde

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