Warai no daigaku (aka University of Laughs) de Mamoru Hosi

Chroniques tous | ciné | défaut

Tout d’abord il faut ignorer le titre, “l’université du rire” en français, qui ne laisse présager rien de bon quand on sait le penchant japonais pour le grand n’importe quoi tout azimut qu’ils emploient avec plus ou moins de finesse. Ce titre n’est que le nom d’un théâtre comique du quartier d’Asakusa qui est au centre du récit.
L’histoire, tirée d’une pièce à succès, se situe à la veille de l’entrée en guerre du Japon lors de la deuxième guerre mondiale. Elle met en relation un dramaturge comique, forcé de soumettre ses écrits à la censure, représentée ici par Yakusho Koji, impérial en censeur hermétique à l’humour, formant ainsi un duo comique basé sur leurs oppositions.

Variante intelligente de la pièce dans la pièce, l’action se situe uniquement dans une salle austère où le dramaturge présente maintes et maintes fois les nouvelles versions de sa pièce, corrigées suite aux demandes de la censure, mais se révélant à chaque fois plus impertinentes. Si l’histoire s’était contentée de cette opposition, elle aurait rapidement tourné en rond. Lentement l’hermétisme à l’humour du censeur diminue, se transformant en intérêt curieux avant de galoper vers un furieux enthousiasme, inversant l’espace d’un instant les rôles du bouffon et du stoïque, et transcendant un obscur fonctionnaire en tempête de créativité. Mais tout le génie du film est de ne pas oublier le contexte dans lequel il se situe, et bien qu’il soit une comédie réellement poilante, il n’hésite pas à glisser vers le drame forcément imposé par cette époque de boucherie mondiale.
Face à l’énergie et à la recherche perpétuelle du rire déployées durant tout le film, le drame ne prend que plus d’ampleur, tout en parvenant à éviter de sombrer dans le mélodramatique, transbahutant nos émotions avec une variété appréciable. Il est par contre dommage que la réalisation ne soit pas à la hauteur de l’histoire. Même s’il est difficile de ne pas se répéter lorsque l’unique lieu de tournage est une pièce hermétiquement close, le réalisateur semble avoir préféré laisser le champ large au jeu des acteurs plutôt qu’à la mise en scène, tout en usant pourtant parfois de la musique ou des effets visuels un tantinet trop poncifs, desservant l’intensité dramatique mise en place par les acteurs. Malgré cette réalisation un peu mollassonne, rien n’empêche le duo de briller et de nous offrir de nombreux éclats de rire. Et pour la petite anecdote, le dramaturge s’est inspiré d’un auteur de théâtre japonais du début du siècle, malmené par la censure et qui est malheureusement mort à trente-cinq ans en défendant un pays dont il ne savait plus quoi penser. Quand la réalité rattrape la fiction, la mise en abyme de la pièce dans la pièce n’en est que plus troublante.

Éditeur :

Pays : Japon

Évènements à venir