Un parfum de corruption de Zhenyun Liu sort en librairie.

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Que peut-il y avoir de commun entre une jeune femme partie à la recherche de l’ex-femme de son frère qui les a floués de 100000 yuans cinq jours après les noces ? Entre un gouverneur provincial, un directeur de l’administration routière du département responsable de la construction des routes et des ponts d’un banal district et un directeur adjoint du département de la protection de l’environnement ? Rien a priori si ce n’est un fil ténu entretenu par Liu Zhenyun dans son nouveau roman Un parfum de corruption.

En effet, aucun d’entre eux ne se connait, même si occasionnellement certains se croisent. Chacun des six chapitres proche de la novella révèle, par petites touches grinçantes, toute l’étendue de la corruption d’une Chine moderne tel un parfum insidieux. Quelque soit son statut, chaque individu se voit réduit à de vils marchandages afin d’assurer sa position bien souvent précaire. Song Caixa se vend comme épouse avant de s’enfuir avec l’argent de la tractation. Niu Xiaoshi partie à sa recherche, doit se prostituer pour récupérer une somme équivalente pour s’acheter un restaurant. Par là même, elle ruine une restauratrice concurrente qu’elle emploiera alors. Et ce, jusqu’à ce que celle-ci la trahisse et s’avère la maîtresse de son mari !

Mais aussi, le gouverneur provincial, tout au long de son ascension sociale, n’a de cesse de nommer des subalternes à des postes de responsabilité pour les utiliser afin d’aplanir des situations compromettantes pour sa situation.

D’une écriture précise et sans concession, l’auteur déstructure la société chinoise telle qu’elle s’est constituée avec le mot d’ordre de Deng Xiaoping : “enrichissez-vous”. Ou comment un système dévolu au bien-être de tous : le communisme finit par les enserrer dans une nasse de laquelle aucun ne peut sortir indemme. On voit à l’œuvre les rouages qui s’enclenchent inexorablement pour asservir chacun. Les combines ont remplacé l’idéologie et tout est marchandage. Devenu le seul moyen, l’argent justifie donc la fin, quel qu’en soit le prix à payer.

Un roman à la veine à la fois picaresque et satirique, d’une pertinence consommée !

Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON

Un parfum de corruption, Zhenyun Liu, traduit du chinois par Geneviève Imbot-Bichet, 344p., 22,50€ (e-book : 7,99€), collection Du monde entier, éd. Gallimard.

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