Miyamoto Musashi est le personnage incontournable du folklore japonais. Dans l’introduction de ses œuvres complètes, Pietro Amadini nous restitue l’humain par l’intermédiaire d’une analyse percutante et érudite de son parcours. Il y expose maintes vérités sur le ronin, ce guerrier sans maître. Sa légende a dévoré l’homme au travers d’une production iconographique fantasmée et pléthorique tout au long des siècles (du XVIe au XXe).
Sans négliger l’importance du mythe que revêt le personnage de Musashi, Ornella Civardi, qui dirige l’ouvrage, s’attelle à nous imprégner de la démarche spirituelle de son engagement dans le bushido, la voie du sabre. Le traité des 5 roues, son œuvre maîtresse, place le paradoxe au cœur de sa démarche. En effet, dans un combat, comment vaincre sans mouvement ? Telle est la question à laquelle ses écrits répondent.
Au cours des dernières années de sa vie tumultueuse, assagi, Miyamoto Musashi consigne, en effet, par écrit l’expérience de toute une carrière de combats singuliers. Pour les samouraïs, il s’agit de pèlerinages de recherche pour se confronter à d’autres écoles de sabre ou à de fins bretteurs, musha shugyô. Plus qu’une somme, le traité est avant tout une suite de certificats qui valident l’acquis des capacités de ses élèves. Clairement, il y énonce qu’on parviendra à posséder un pouvoir secret en le suivant fidèlement. De plus, Miyamoto Musashi ne renonce pas au monde, car pour lui, le devoir du guerrier n’est pas de mourir, contrairement à ce qu’énonce le Hagakure, mais de vaincre. En d’autres mots, savoir faire mieux que ses adversaires. À l’instar des moines zen, il s’agit de placer l’esprit au centre, sans être dirigé par la pensée.
Si Miyamoto Musashi est un fin théoricien, il le doit avant tout à son expérience des champs de bataille. Il participe à la plus fameuse, celle de Sekigahara en 1603 (1), mais dans le camp des perdants. Toutefois, il réchappe à la mort pour bénéficier de la Pax Tokugawa. C’est alors qu’il affermit sa maîtrise des deux sabres auprès de divers Daimyo qu’il sert.
Ce bel ouvrage ravira tout lecteur féru du moyen – âge nippon. Son aspect broché et d’un format plutôt compact le rendent aisé à consulter. En plus d’une introduction éclairante et d’une présentation de chaque œuvre très riches et didactiques, des textes érudits (certains sont traduits en français pour la 1ère fois), de nombreuses estampes valorisent l’esthétique des samouraïs, mais aussi leur art et leur stratégie.
Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON
(1) Lire notre article https://asiexpo.fr/sekigahara-la-plus-grande-bataille-de-samourais-de-julien-peltier/
Traité des cinq roues et autres écrits de Miyamoto Musashi, œuvres complètes, 272 pages, 19,90 €, éd. nuinui.