Au regard de ses immenses conquêtes, Tamerlan a pu légitimement se prévaloir d’être un aussi grand conquérant que Gengis Khan (1). C’est ce que démontre Maria Szuppe dans son dernier ouvrage : Tamerlan et les Timourides.
Il est né en Asie centrale en 1330 dans une tribu turco-mongole récemment islamisée : les Barlās, au sein de l’ulus (peuple, lignée, maison) de La Transoxiane, le berceau de sa famille. Ce peuple est ancré dans deux traditions imbriquées : turco-mongole et irano-musulmane. C’est dire la richesse de son patrimoine.
Petit chef tribal dans sa jeunesse, il se montre très vite un véritable meneur d’hommes. Il lui faut dix ans pour être reconnu amir (émir) et ainsi accéder au pouvoir suprême. N’étant pas de descendance gengiskanide, il doit céder le titre de khan à un parent fantoche de la famille du grand aïeul.
Bien qu’ayant la réputation d’un conquérant impitoyable, Tamerlan cherche avant tout à agrandir son territoire soit par la négociation, soit par des mariages ou encore par des redditions habilement négociées. Et il parvient souvent à ses fins.
Toutefois, lorsque ces méthodes échouent, il n’hésite pas à partir en guerre afin d’imposer ses vues aux récalcitrants. Et gare à eux s’ils sont vaincus. Aucune pitié n’est à attendre de ce guerrier sanguinaire. Les massacres sont légions tout au long de ses conquêtes.
Fort d’un territoire s’étendant la Turquie jusqu’à l’Inde, il meurt en 1405 au cours d’une nouvelle campagne militaire. Il s’apprêtait à envahir la Chine des Ming, pas moins !
Si l’autrice débute inévitablement son essai par les campagnes militaires du grand conquérant, elle prend bien soin d’expliciter l’ensemble de la société édifiée par lui et ses descendants les Timourides jusqu’au milieu du XVIè siècle.
C’est ainsi que Maria Szuppe nous détaille la richesse des édifices construits sous le règne de ces seigneurs jusqu’à parler de culture timouride. Elle nous précise aussi les modes de vie quotidienne, les religions dont le soufisme n’est pas des moindres. Les sciences et la littérature rayonnent aussi comme jamais.
De même la vie économique et le pouvoir sont passés en revue pour mieux nous interpeller sur les enjeux auxquels Tamerlan fait face pour se maintenir si haut. C’est ce qui rend cet essai incontournable. Il l’est aussi par la précision et la multiplicité des renseignements au sujet de régions si lointaines pour nous dans le temps et l’espace.
Tamerlan reste cependant une figure controversée de l’Histoire. Loué pour ses réalisations militaires et architecturales, il se voit condamné pour sa brutalité et ses méthodes implacables. Son règne laisse une empreinte durable sur les régions qu’il a conquises, marquant à jamais l’Asie centrale et le Moyen-Orient.
Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON
(1) Lire notre chronique : https://asiexpo.fr/le-khan-empereur-des-steppes-de-honot-et-ramaioli-chez-mosquito/
Tamerlan et les Timourides Asie centrale et Iran (mi-XIVedébut XVIes.) de Maria Szuppe, 358 pages, 29,50€, Hors collection, éd. Belles Lettres.