OUTLAW PLAYERS, volume 1 de SHONEN

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Thera est le nom d’un jeu en ligne d’un nouveau genre. Plus besoin d’écran ou de manettes, on y plonge comme dans un rêve par le biais d’un casque qui émet des impulsions directement dans le cerveau. Dans ce monde alternatif aux possibilités infinies, chacun peut devenir un véritable héros. Mais pour Sakuu, l’aventure tourne au drame. N’ayant aucun souvenir de son immersion, ce joueur n’arrive pas également à ouvrir son interface de jeu, ce qui l’empêche d’accéder à ses items de soin, mais aussi de se déconnecter ! Aussi, nul ne sait ce qui pourrait lui arriver en cas de Game Over… Seulement, Sakuu découvrira bien vite qu’il n’est pas le seul à souffrir de ce bug : il est un « Outlaw Player », condamné à survivre dans cet univers aussi fantastique que dangereux !

Après de nombreuses créations en collaboration directe avec des auteurs japonais, les éditions Ki-oon n’avaient pas encore proposé de création 100% made in France. Mais en parallèle du « tremplin manga » destiné à révéler les talents de la scène hexagonale, l’éditeur corrige finalement le tir en juillet 2016, avec la sortie du premier volume d’Outlaw Players, signé par Shonen. Néanmoins, ce dernier est loin d’être un nouveau venu dans le milieu du manga français. Nous l’avons ainsi découvert dès 2007 avec BB Project puis Omega Complex, publiés aux Humanoïdes Associés, puis Lords of Chaos chez Pika (en hiatus depuis 2014). Cependant, Outlaw Players est un projet autrement plus personnel pour Shonen, assurant pour la première fois le scénario en plus du dessin.

Un monde virtuel ultra-immersif, des joueurs piégés pouvant mourir pour de vrai,… À la présentation du synopsis, bon nombre de lecteurs n’ont pu s’empêcher de souligner de féroces ressemblances avec quelques light novels populaires, tels Sword Art Online ou Log Horizon. Assumant ces atomes crochus, Shonen les défend avec deux arguments. D’une part, la première version d’Outlaw Players est un web-comic imaginé en 2002, soit bien avant les romans précités. L’auteur note cependant qu’il s’agissait de petits délires semi-indépendants, et que les discussions avec Ki-oon ont permis de structurer tout ça en une histoire suivie et cohérente. D’autre part, Shonen compte bien nous prouver au fil des chapitres que son histoire se distingue grandement de ses congénères.

Dans ce premier volume, il est encore un peu tôt pour que nous puissions faire ce constat d’originalité. Le chapitre pilote est une introduction à part entière, initialement présentée du point de vue de Velda, une voleuse charismatique découvrant notre héros amnésique. Elle fera ainsi office de guide en expliquant à Sakuu (comme au lecteur) les mécanismes qui régissent Thera. La focale glissera progressivement vers notre héros, jusqu’à la séparation des deux protagonistes (dans l’attente de probables retrouvailles). Par la suite, notre héros voguera vers son propre destin, et rencontrera Okoto, une Outlaw Player comme lui, de quoi en apprendre davantage sur cet état particulier.

Ainsi, ce premier tome consiste avant tout en une exposition d’une succession de concepts, pouvant se révéler assommante à terme, d’autant que tout n’est pas encore complètement mis en pratique. Pour autant, Shonen n’oublie pas d’inclure plusieurs séquences d’action, composées de duels entre joueurs ou de combats face au bestiaire environnant, pour mieux faire passer la pilule de toutes ces explications. En outre, l’auteur prend un malin plaisir à glisser plusieurs références au monde du RPG (Final Fantasy, Monster Hunter) dont il reprend certains principes, mais aussi à des mangas cultes comme Slam Dunk ou Jojo’s Bizarre Adventure. Enfin, le point fort de Shonen reste avant tout son dessin, à la fois très dynamique et riche en détails. Si on a souvent comparé son trait à celui d’Oh!Great (Enfer et Paradis, Air Gear, Biorg Trinity), l’auteur affirme à présent une identité de plus en plus marquée, sans avoir à rougir de la comparaison avec les productions japonaises. Un regret cependant : mis à part l’île de Trajaak dans l’introduction, les décors restent pour l’heure assez classiques et bien peu animés.

Il est donc encore un peu tôt pour déclarer qu’Outlaw Players tire son épingle du jeu, dans un genre aujourd’hui à la mode et, de fait, surreprésenté en librairie. Pour autant, ce premier tome pose des bases prometteuses, et la fluidité de la narration nous pousse à en savoir davantage. Mais surtout, on se réjouit que Shonen bénéficie d’une nouvelle mise en lumière grâce aux éditions Ki-oon, qui lui laissent tout le loisir de s’exprimer pleinement dans ce projet très personnel. Souhaitons ainsi que la série trouve son public, pour que l’aventure ne soit pas brutalement interrompue par une rupture de connexion.

OUTLAW PLAYERS, volume 1 de SHONEN (2016)

Aventure/Fantasy, France, Ki-oon – Shonen, juillet 2016, 192 pages, livre broché 7.90 euros

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