Les éditions SULLY – fervent trait d’union entre le Japon et la France – font encore un pas vers notre connaissance du pays du soleil levant. Bien que le manuscrit original soit américain, les 28 entrées de L’esprit japonais, fort bien traduit, ont le mérite, une nouvelle fois, de nous aider à pénétrer au cœur de la psyché japonaise, de ses us et coutumes. Non qu’on devienne sujet de l’empereur Naruhito après leur lecture, tout de même pas ! Cependant, il ressort de l’ouvrage un réel effort pour nous permettre de mieux appréhender les comportements nippons dans ce qu’ils nous apparaissent rigides, distants ou matois.
Sous forme d’abécédaire, les 2 auteurs arrivent à circonscrire les principes fondamentaux de la japonité. Comme le système du ie par exemple : à la fois bâtiment d’habitation, famille, ménage, groupes familiaux etc… C’est en effet de tout temps que la structure familiale s’est consolidée avec la prédominance patriarcale quelle que soit la position sociale du groupe. Ceci avait pour volonté de perpétuer la lignée dans le temps. Cette façon rigide de consolider la famille permettait également une plus grande solidarité entre ses membres. Chacun dépendait de l’autre.
Autre entrée à la portée sociétale des plus prégnantes : les relations hommes-femmes danjo kankei. Si, jusqu’à la fin du Moyen Âge, aucun genre ne prévalait, il n’en va pas de même à l’époque Edo (1603-1868) où le néo-confucianisme du shogunat Tokugawa donna tout le pouvoir au seul premier mâle de la famille. Tout en ne perdant pas de vue les notions incontournables de l’esprit japonais : la famille et la perpétuation de la lignée. Ce qui, jusqu’à maintenant, a peu changé. Les femmes assurent les tâches ménagères, s’occupent des enfants, gèrent les relations familiales tandis que les maris chez-eux errent sans rien faire, tels des sodai-gomi « déchets encombrants ».
S’il demeure bien un fond historique des relations entre les Japonais, celui-ci au sein de la jeunesse tend à s’estomper. En effet, le livre prévaut surtout pour la partie âgée de la population toujours imprégnée de la doctrine patriarcale sans même en être consciente. D’où les difficultés de compréhension et de malentendus avec les gaijin : les étrangers.
Un livre très instructif où les doctrines sont fort bien étayées par de nombreux exemples répertoriés en fin d’ouvrage dans une partie bibliographique nommée « Références ». Pour certains points de détail on se penchera sur le Glossaire extrêmement fourni afin de mieux approfondir des notions qui, bien souvent, vont à l’encontre de notre vision des relations humaines.
Pierrick SAUZON
L’esprit japonais Comprendre le Japon et ses habitants, Roger J. Davies et Osamu Ikeno, traduit de l’anglais par Françoise Escande-Boggino et Isabelle Boudon, USA, 240p., 17€, collection Le Prunier, éd. Sully.