Le cinéma comme combat : interview de Im Sang-soo

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En 1999, le festival Cinémas & Cultures d’Asie découvrait presque par hasard le premier film d’un réalisateur coréen, alors complètement inconnu. 5 films et 7 ans plus tard, nous recevons à Lyon Im Sang-soo, avant la sortie de son dernier film “Le vieux jardin”.

DEBUTS

Pourquoi êtes-vous devenu réalisateur ?
Pourquoi devenir peintre, musicien ou professeur ? Je crois que le métier que nous choisissons d’exercer n’a rien d’innocent, mais exprime – au contraire – une sorte de rancœur que nous portons en nous. Comme aller contre le système politique ou dénoncer certaines injustices…

Pourquoi ne pas être devenu homme politique alors ?
Parce qu’il y a des politiciens pour cela et que ce n’est définitivement pas de mon ressort… Et parce que j’adore trop la provocation pour assumer une telle fonction.

AVENIR

Est-il vrai, que vous êtes en pourparlers pour une réadaptation de Good lawyer’s wife (aka Une femme coréenne), qui se déroulerait cette fois à Paris ?
Tout d’abord, je dois vous avouer être très heureux que quatre de mes cinq films (Girls’ Night Out, Une femme coréenne, President’s Last Bang et Old Garden à venir en avril 2007) soient distribués en France et qu’ils soient bien accueillis. Quatre films sur cinq, c’est une bonne moyenne pour un réalisateur coréen, non ?
En fait, j’ai été contacté par l’actrice française Isabelle Huppert; elle disait être intéressée pour me rencontrer. Isabelle Huppert… vous imaginez ? En Corée, j’ai même du mal à rencontrer les acteurs prévus pour jouer les seconds rôles et voilà que m’appelle une actrice de renommée internationale pour me donner rendez-vous dans un café parisien. J’espère sincèrement pouvoir travailler avec elle sur ce projet.

SCREEN QUOTAS

Que pensez-vous de la révision de la loi sur les screen quotas ?
(Ndla.: Sous la pression des grands studios américains, le gouvernement envisage d’abandonner une loi obligeant les salles coréennes à donner la priorité aux productions nationales sur un nombre donné de jours par an. L’abandon aurait bien évidemment pour conséquence de permettre une plus grande présence des films américains au détriment de la production locale).
Début juillet, le réalisateur IM Kwon-taek a appelé l’ensemble des réalisateurs et techniciens coréens à se rassembler pour organiser une marche de protestation contre l’abolition du screen quota. J’ai été invité à participer à cette manifestation, mais j’ai été retenu sur mon dernier tournage. Je dois avouer, que cela m’arrangeait bien. Bien que je soutienne bien évidemment mes confrères, j’ai une sainte horreur à m’afficher ainsi.

Vous ne croyez pas, que cette abolition puisse avoir pour conséquence une présence renforcée des productions américaines au détriment des films coréens ?
On en discute beaucoup entre copains et confrères réalisateurs. L’abolition des screen quotas risque bien évidemment de renforcer la présence des productions américaines ; mais personnellement, je pense que les Etats-Unis finiront de toute façon par avoir raison de notre système actuel ; ce qui n’est pas du tout une attitude défaitiste ! La production cinématographique coréenne est actuellement au plus haut. Le nombre de films est en progression perpétuelle et de plus en plus de producteurs investissent dans une multitude de genres différents. J’ai confiance en notre cinéma et je suis persuadé que cette abolition n’aura finalement aucune conséquence. J’oserai même comparer notre situation actuelle à celle de la France, qui – malgré le libre marché – réussit à conserver sa richesse cinématographique.

Entretien réalisé par David Vivier et Bastian Meiresonne
Photos de Martine Furnion
(Propos recueillis le 06 juillet 2006 à Lyon)

Pays : Corée du Sud

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