Hollande, milieu du XVIème siècle, Amélie est « une jeune fille brillante » et curieuse de connaissances. Sa famille désargentée a dû la céder à Hans, un marchand de la bonne société. Ses rêves de découvertes en prennent un coup. Mais, elle fait ses recherches en secret entre les corvées qu’elle doit assumer en raison de sa mésalliance.
Heureusement Hans part souvent en voyage pour son commerce. C’est en rentrant de l’un d’eux qu’il rapporte une esclave du « bout du monde » aux traits asiatiques. Les deux femmes s’observent, se confrontent et finalement vont faire front ensemble.
On apprécie le graphisme précis de Yudori dont c’est le premier album. L’artiste coréenne est effet connue pour ses webtoons. Se passionnant pour le féminisme et la littérature européenne, elle se lance dans le roman graphique.
Son style rappelle fortement celui de François Bourgeon et ses Passagers du vent avec une orientation manga très sophistiquée. La richesse des points de vue, la construction de planches très dynamiques en font un album très agréable à lire. Les multiples références à la peinture hollandaise de l’époque, Vermeer en tête, est un réel plaisir.
Les autres références plus scientifiques sont quelque peu anachroniques. Yudori s’est inspirée des recherches des frères Montgolfier pour nourrir celles d’Amélie… Mais le résultat est probant. L’album parle ainsi de toutes les limitations que l’on met aux femmes dès qu’elles veulent s’émanciper. Les recherches secrètes d’Amélie sont pillées par son mari. Il annihile les ambitions matrimoniales de sa jeune servante et abuse de son esclave sexuelle.
Mais le bonheur et la liberté sont ailleurs. Pour Amélie et la jeune esclave aux rondeurs sensuelles, mieux vaut vivre cachées. Les rêves et l’imagination viendront à bout de l’enfermement.
Ce premier essai est une réussite graphique !
Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON
Le ciel pour conquête, récit complet de Yudori, 336 pages, 25,50€ éd. Delcourt. En librairie le 4 mai 2022.