Festival Fantasia de Montréal 2000

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Montréal la ville aux 13 festivals de cinéma possède une salle de 1913, ancien théâtre et nouveau temple du cinéma d’Ailleurs. Chaque année en juillet, l’Impérial accueille Fantasia, le 1er festival du continent nord américain par son importance (75 000 spectateurs) dédié au cinéma asiatique et fantastique. Asiexpo était au rendez-vous.

“Je me souviens” *
ou plutôt j’oublierai assez vite les cinq films hongkongais d’excellente facture, honnêtes, carrés, parfois avec génie mais sans très grande surprise. Ne s’appelle pas qui veut John Woo ou Tsui Hark, désolé Julien !
“2000 AD” de Gordon Chan, est une Formule 1 qui roule tellement vite qu’on n’a pas le temps de s’ennuyer. Quand les hongkongais restés à HK se croient à Hollywood !
“Bullets over summer” de Wilson Yip n’a pas cette prétention. Son film connaît quelques temps morts plutôt inspirés (notamment l’irruption des deux flics chez la grand-mère, l’attente dans leur planque, le repas quasi familial) et des scènes d’action (la fusillade dans l’immeuble, la poursuite) dignes des meilleurs polars.
“The Mission” produit et réalisé par Johnnie To est un néo-polar interprété par Francis Ng et Anthony Wong au sommet de leur forme. Du même réalisateur “Running out of time” est une belle réussite, un exercice de style à “l’ancienne” mais mon film hongkongais préféré de cette sélection. Quant à “Victim” de Ringo Lam, il oscille entre différents genres (fantastique, polar) et a permis d’accueillir Lau Ching-Wan ainsi que son épouse et actrice Amy Kwok.

“Legend of the Sacred Stone” film de sabre et d’arts martiaux taïwanais en Première Internationale à Fantasia entièrement tourné avec des marionnettes, est dans la plus pure tradition d’un King Hu ou d’un Tsui Hark façon “Zu, les guerriers de la montagne magique”. Du grand cinéma.
“Nang Nak” est une revisitation de “Histoires de Fantômes Chinois” version thaïe, une belle carte postale avec de très belles couleurs et de très beaux décors, une belle histoire d’amooour éterneeel, une dose de surnaturel, une autre de bouddhisme, et vous obtenez le succès de l’année 99 en Thaïlande. Un film qui devrait toucher les publics du monde entier. Nous verrons peut-être le film en France prochainement.

Autre première pour Fantasia, deux films indiens étaient cette année à l’affiche : “Muthu”, un film masala, tout droit sorti des studios de Bollywood, succès populaire en Inde… et au Japon. Et prochainement aux USA. Quant à la France, il faudra attendre un peu.
Sans doute, bien supérieur (je n’ai pas vu “Muthu”), “The Terrorist” le premier film de Santosh Sivan, remarqué lors d’un festival par John Malkovich, celui-ci en fait la promotion à travers le monde, et visiblement il a raison. Un des meilleurs films indiens de ces vingt dernières années.

De l’offensive de l’armada nippone (25 films sur une soixantaine dont une quinzaine de courts métrages) avec une révélation : Takashi Miike, le réalisateur qui fera bientôt l’unanimité auprès des critiques et cinéphiles français, (et rejoindra le clan des Kitano, K. Kurosawa, et Tsukamoto). “Dead or Alive” dont la violence extrémiste n’est pas sans rappeler le jusqu’au-boutiste des westerns de Peckinpah (voir la démesure de la scène finale entre le flic et le yakusa). “Audition” débute comme une comédie un peu potache, un veuf décide de se remarier et fait passer une audition afin de trouver l’élue de son coeur. Le rire de la première partie cède la place ensuite à l’effroi, à l’horreur la plus totale, puis à l’insupportable (lorsque le veuf se retrouve immobilisé mais conscient face à son élue qui le torture sans aucun état d’âme). On en ressort secoué mais avec la conviction qu’un immense réalisateur est né.
“Freeze me” a la particularité comme la quasi-totalité des films nippons présentés à Fantasia de vous entraîner là où vous ne vous y attendez pas. Dans “Freeze me” la violence du début (un viol) se mue en une presque comédie (à l’arrivée de chaque nouveau frigo par exemple ou lorsque l’héroïne dialogue avec les corps congelés). Lorsque Haru, agent d’assurances débutant, rend visite au couple inquiétant de “The Black House” sa vie bascule, et bouscule à chaque nouveau plan le spectateur. Avec “Chaos”, Hideo Nakata revisite le thriller sur le thème de la machination. N’oublions pas que ce maître de l’angoisse est le réalisateur de Ring 1 et 2, films qui déchaînent les passions dans les festivals du monde entier. Ring 0 qui relate la genèse des événements, ne faillit pas à la règle, et accumule les effets qui font le succès de la série.
Un homme doit filmer une femme sept jours durant. Macoto Tezka, fils de Osamu Tesuka que les amateurs de manga connaissent, nous entraîne dans son “Experimental Film” à un voyage entre rêve et réalité, où le sujet filmé devient “filmeur” et le spectateur amoureux. “Experimental Film” tout comme “Hakuchi” l’avant-dernier film de Macoto Tezka présenté au Festival de Deauville, impressionne par ses qualités d’(ré)invention du 7e art.
De 8e art, il serait question avec “Iku” (traduction japonaise de “je jouis”), cyber-punk-porno entièrement tourné en vidéo digitale, annoncé comme un des événements majeurs du festival (deux fois salle comble soit 2000 places) fait figure de bel objet déviant mais peu dérangeant. Dommage car sa réalisatrice Shu Lea Cheang, présente avec l’actrice principale et le producteur, est d’une intelligence rare dans ses propos.
Passons sur “Lies” ou “Fantasmes”, dans les salles obscures françaises depuis deux mois, et attardons-nous sur l’autre film coréen “Attack the gas station” de Kim Sang-Jin, qui confirme la montée en puissance du cinéma du pays du “Matin Calme”. Un de mes films préférés. Quatre voyous s’emparent d’une station service et deviennent pompistes d’occasion. Un film qui vous fait aimer le cinéma asiatique surtout grâce à une bonne dose d’humour, -qui manque généralement à ce genre de film- action, baston, flash back, et happy end.

Côté japanimation, je n’ai malheureusement pas pu assister à la projection de “Vampire Hunter D”, par contre “Alice” de Maejima Kenichi, un film d’animation futuriste en 3D et “Blood, The Last Vampire” de Hiroyuki Kitakubo à l’univers graphique proche de Jin-Roh (c’est d’ailleurs la même équipe) m’ont favorablement impressionnés.

Fantasia est décidemment, depuis 5 ans, le rendez-vous incontournable des amateurs de cinéma asiatique. Un festival certes à l’échelle d’un continent mais riche en convivialité et découvertes (voir interview de Julien Fonfrède, programmateur de la section asiatique, en page suivante).
Plus d’infos sur le site web du festival : www.fantasiafest.com

* inscription sur toutes les plaques minéralogiques des voitures au Québec

(Adresses utiles à Montréal pour le lecteur d’Asie News ) :
livres sur le cinéma asiatique : 2 grandes librairies : INDIGO (angle Ste Catherine et Mc Gill College St) et CHAPTERS (angle Ste Catherine et Stanley St) et nombreuses bouquineries rue St Denis
Japanime : MARCHÉ CLANDESTIN (325 Ontario Est, M° Berri)
video-club japonais, HK, japanime : MITSUKO (703 Legendre Est, M° Cremazie) la meilleure adresse à Montréal.
cd-dvd-vcd HK : KAM FUNG (1008 Clark St, Chinatown)
POP ASIE & TIEN HUA LIBRARY (manga) (1112 A St Laurent, Chinatown)

Pays : Divers

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