DREAM TEAM (AHIRU NO SORA) volume 39-40 de Takeshi HINATA

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A la toute fin du tome précédent, Takeshi Hinata nous laissait sur un suspense insoutenable. Dans la finale des éliminatoires départementales, l’équipe de Kuzuryu tient admirablement tête à ses adversaires de Shinmaruko, pourtant favoris, au point de revenir au score dans les toutes dernières secondes du match. Il suffit d’un instant pour que Momoharu, le capitaine de l’équipe, soit bénéficiaire d’un ultime lancer franc pouvant faire basculer le match. Il suffit d’un instant…. qui ne nous a pas été dévoilé. Aussi, après deux mois d’attente portés par une frustration insoutenable, arrive enfin ce nouveau volume double de Dream Team. Apportera-t-il ou non l’issue que nous espérons tous ?

Et contre toute attente, le récit part dans une direction que personne n’attendait : celle d’une ellipse de quelques mois, en plein été, où l’on retrouve nos héros apaisés, loin de l’intensité dramatique du chapitre précédent. Dans cette ellipse, intitulée Early Last Days, le fin mot de l’histoire nous y est présenté sans fioriture ni émotion. Comme si tout cela ne comptait déjà plus. Comme si l’on se préparait déjà à une nouvelle ère, à rencontrer de nouveaux visages, à partir dans de nouvelles aventures. La décontraction des personnages est palpable, et l’on apprécie les retrouver dans un climat aussi serein, mais pour autant, peut-on totalement se réjouir ? Il y règne dans l’ensemble de ce chapitre un sentiment doux-amer tel qu’on ne l’avait jamais ressenti dans un récit sportif, sinon peut-être il y a fort longtemps, quand s’achevait un certain Slam Dunk, là aussi avec son lot de frustration et de perspectives joyeuses. Sauf qu’ici, il reste encore tant à écrire.

Oui, Takeshi Hinata est un véritable génie dans la maîtrise des émotions, nous emmène là où il veut sans que l’on y trouve jamais à redire, et se concentre sur ce qui semble pour lui essentiel. Et s’il fallait encore prouver tout son talent : alors que l’on a fini par accepter l’état de fait qui nous était présenté, de suivre les héros dans de nouvelles directions, voilà qu’au terme de ce chapitre pivot de cent pages, une nouvelle surprise est au rendez-vous. Un torrent de joie qui est d’autant plus efficace que l’on ne l’espérait plus, et qui nous envahit à la hauteur de l’euphorie qui anime nos héros. En jouant sur la temporalité, en relativisant l’intérêt des scores, l’issue des matchs, le mangaka cristallise l’essentiel : mettre en avant des moments intenses, parfois triomphants, parfois cinglants, en nous guidant pour mieux les affronter ou les savourer. Preuve que Dream Team est un shônen sportif qui ne ressemble à aucun autre, qui ne fait pas de ses personnages des surhommes, mais des héros qui apprécient chaque victoire du quotidien.

Ainsi, dans la suite du volume, nous naviguons dans un sentiment encore inédit, porté par une profonde ironie dramatique : tandis que chaque protagoniste aiguise ses talents en vue des enjeux futurs, de nouvelles donnes se dessinent, des changements sont actés, préparant ainsi une transition dont on entrevoit déjà la finalité. Et pourtant, malgré irrémédiablement de l’issue, on ne peut empêcher d’espérer, de croire en eux, de les suivre dans chacun de leur pas. Et au final, n’est-ce pas le lecteur lui-même qui navigue dans l’inconnu, après tant de sursauts narratifs ? Dans un genre aux canevas si codifiés, il est tellement agréable de se laisser porter à de telles surprises.

Alain Broutta

DREAM TEAM (AHIRU NO SORA) volume 39-40 de Takeshi HINATA (2004)
Sport/Tranche-de-vie, Japon, Glénat-Shonen, mai 2017, 416 pages, livre broché 10,75 euros

 

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