La sortie du coffret 4 dvd “Ronins et yakuzas” édité par HK Vidéo perpétue la tradition d’une poignée de passionnés à faire reconnaître le talent du réalisateur Hideo Gosha jusque-là snobé par la critique au profit de grands noms tels que Kurosawa, Mizoguchi et Ozu. Sans évidemment pouvoir prétendre au génie de ses illustres modèles, il mérite pourtant d’être redécouvert par une large part du public, notamment pour ses crépusculaires chambaras (films de sabre japonais).
Kiba, le loup enrage (1966, 75 min)
Kiba, l’enfer des sabres (1966, 72 min)
Samourai sans honneur (1966, 91 min)
Quartier violent (1974, 95 min)
Au cours de ses errances à travers un Japon désertique, le samouraï vagabond Kiba protège un relais postal contre les incessantes attaques de nobles provinciaux tentant de mettre la main sur la rentable entreprise.
Talentueux réalisateur de séries télévisées populaires durant les années 50, Hideo Gosha gère parfaitement son passage sur grand écran en début des années 60 avec deux premiers longs métrages très remarqués. Voulant asseoir son statut, il quitte son ancien employeur pour les prestigieux studios de la Toei. Mal lui en prend, car il sera dès lors condamné à réaliser avant tout des projets commerciaux, tel ce “Kiba, le loup enragé”. A l’origine pensé comme le départ d’une longue série, l’insuccès vaudra le filon de s’effilocher au bout du second épisode : “Kiba, l’enfer des sabres”.
Dans ce volet, Kiba est embauché pour escorter un convoi de prisonniers. Parmi eux se trouve un homme lui rappelant son défunt père. Le taulard va profiter de l’état de confusion du samouraï pour l’aider à s’évader, puis à prendre possession d’une mine d’or.
Largement inspiré de ribambelle d’autres produits populaires de la même époque (et notamment des aventures du masseur aveugle “Zatoichi”), “Kiba” esquisse le portrait d’un samouraï vagabond solitaire errant dans la campagne japonaise. Fin bretteur et dur à cuire, il cache mal un noyau tendre, faisant chavirer le cœur de nombreuses demoiselles.
Cependant le personnage principal manque singulièrement de charisme et ne suffit pas à compenser une intrigue des plus classiques. Un pur divertissement sans grande originalité.
Après avoir été trahi par les siens et perdu un œil et un bras dans un dernier combat, un samouraï bafoué se met à l’écart de la société en prenant le nom de Tange Sazen. L’heure de sa rédemption sonne, lorsqu’il réapparaît en possession d’une mystérieuse jarre, enjeu de bien des convoitises.
Adaptation du célèbre feuilleton publié dès la fin des années 20 dans un grand journal nippon, le personnage de Tange Sazen acquiert renommé et réputation à travers les bandes dessinées du “Dieu du manga” Tezuka Osuka, puis à travers une trentaine de longs métrages. “Samouraï sans honneur” en sera le dernier avant une nouvelle série télévisuelle et un film (raté) en 2005.
Gosha décide – à travers son adaptation – de privilégier le comique de situation au détriment d’une atmosphère plus lourde et pessimiste perceptible dans d’autres longs métrages. Semblable au personnage de “Yojimbo” dans le film éponyme et de sa suite officieuse “Sanjuro” réalisés par Akira Kurosawa, il affronte ses adversaires à coups d’humour et de pointes de cynisme. Comique de situation largement renforcé par la présence à l’écran de plusieurs personnages secondaires truculents, dont notamment une prostituée voleuse, qui n’a pas froid aux yeux (et saura voir au-delà de l’apparente “laideur” du personnage principal).
L’intrigue est suffisamment rythmée pour ne connaître aucun temps mort et les scènes de combat chassent les moments de pure comédie. Sans constituer un chef-d’œuvre, Gosha transmet à l’image le plaisir qu’il semble avoir pris à réaliser ces folles aventures du samouraï manchot.
Edgawa mène une paisible existence en tant que patron d’un bar flamenco, offert par des responsables yakuzas après sa retraite anticipée et la dissolution de son clan. Dernier souvenir d’une vie passée, il prend très mal le fait d’avoir à rendre son “dû”. Profitant d’un début d’embrasement de guerre entre différents clans, Edgawa règle des comptes très personnels.
“Quartier violent” rend compte de la diversification de genres abordés par Hideo Gosha au cours de sa carrière. Yakuza eiga (film de yakuzas / gangsters) typique, il surfe alors sur un genre à la mode à l’époque, notamment entraîné par les purs joyaux de Kinji Fukasaku.
Le film ne présente rien de bien neuf pour celui qui est un inconditionnel du genre. Ce qui le différencie pourtant est son superbe final. Parfaitement mis en scène, le dénouement est un rare moment de grâce poétique, où les deux adversaires se rendent compte de la futilité de leur combat et la fin d’une époque. Superbe.
Éditeur : HK Video
Pays : Japon