On connait le « jusquauboutisme » des Japonais avec les kamikazes de la seconde guerre mondiale. Le lieutenant Onoda ne dépareille pas avec son aventure qu’il raconte dans Au nom du Japon. En effet, après avoir suivi une formation militaire à la guérilla, il est muté fin 1944, sur l’île de Lubang aux Philippines, afin de contrecarrer l’avancée US. Sa mission principale est de saboter l’embarcadère du port et la piste de l’aéroport. Toutefois l’avancée des troupes ennemies est plus rapide que prévu : la garnison japonaise est balayée. Sitôt après l’Empire capitule, l’armistice est signé sans qu’il ne le sache jamais.
Avec quelques hommes il se réfugie dans la jungle afin de poursuivre le combat. Cependant leur principale préoccupation est de survivre en pillant et en apeurant les Philippins, qui ont repris leur labeur quotidien. Leur présence finit par être découverte par les autorités locales et japonaises, d’autant qu’un des leurs déserte ! Malgré les multiples signes que la guerre est finie, Hiro Onoda et les deux subordonnés qui lui restent se galvanisent mutuellement pour considérer cette reddition comme une manipulation des Américains ! Onoda ne désespère pas qu’un nouvel ordre de mission lui soit envoyé par l’État-major ! A ce jeu-là, le temps passe inexorablement, il perd son dernier compagnon en 1972 et reste encore deux ans, seul, dans son délire guerrier.
Dès son retour à la réalité, Onoda, en tant qu’officier, fait son rapport à ses supérieurs. Suite à la documentation qu’il a accumulée et à une mémoire sans failles, il rédige son récit comme il le ferait d’une dissertation.
Devant un tel manque de discernement de la réalité, on reste atterré par l’intoxication militariste du Japon d’avant-guerre qui a imprégné cet officier. Voilà donc un récit peu banal, mais très réaliste et même prenant ! Une gageüre réussie pour une jeune maison d’édition qui publie des histoires de vie marginales et donc peu communes !
Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON
Au nom du Japon de Hiro Onoda, récit traduit du japonais par Sébastien Raizer, 320 pages, 20.90€, éd. La manufacture des livres. Février 2020.