All we imagine as light de la jeune Indienne Payal Kapadia a remporté le Grand Prix du festival de Cannes 2024, le plus prestigieux après la Palme d’or.
Le long travelling du début du film fait défiler les étals d’un marché matutinal de Mumbai, avec les voix intérieures d’habitants exilés dans la grande ville surpeuplée. La caméra se rapproche ensuite des infirmières d’un hôpital. Prabha et Anu sont colocataires. La première a vu son mari partir pour aller travailler en Allemagne et est sans nouvelles de lui depuis 4 ans au moins. La seconde aime un garçon musulman tandis qu’elle est hindoue et que ses parents cherchent à la marier. Une 3ème comparse, Parvaty, est sur le point de se faire expulser par des promoteurs peu scrupuleux.
Leur quotidien dans la capitale se partage entre le travail, de menus loisirs et de nombreuses entraves à leurs désirs. Parvaty les convie dans son village natal au bord de la mer, où elle possède une maison. Et là, peut-être pourront-elles concrétiser leurs espérances et vivre comme elles l’entendent.
Payal Kapadia vient du documentaire, et ça se sent. Elle prend le pouls de la capitale, grouillant, fiévreux. Elle capte les disparités sociétales, de classe ou de religion à travers le prisme féminin. Ce sont des femmes qui travaillent, ont des désirs, des ambitions. Mais dans Mumbai, elles ont de la peine à exister vraiment.
Le retour à la nature, la mer ou la forêt – le contraste est saisissant entre le bruit et la fureur de la grande ville et le silence de la campagne – les relie à elles-mêmes, les libère.
Un très beau film, tout en douceur. Chacun de ces 3 personnages féminins très différents est une déclinaison de la condition des femmes en Inde. Chacune s’émancipe à sa façon du patriarcat protéiforme.
Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON
All we imagine as light de Payal Kapadia , 2024, 1h55, DVD et Blu Ray distr. Condor Films.