Un film fondé sur l’exposition Van Gogh et le Japon, tant à Amsterdam qu’au Japon et l’essai éponyme publié à cette occasion mettent en lumière l’influence du Japon sur l’artiste et son œuvre.
Bien qu’il ne se soit jamais rendu au Japon, à la différence de Félix Régamey, peintre orientaliste qu’il admirait (1), Van Gogh a été fortement influencé par l’art décoratif japonais. Venant des Pays Bas, il en connaissait déjà nombre d’objets du quotidien. En effet, c’était le seul pays qui avait droit de commercer avec le Japon de 1600 à 1850. De plus, quand il arrive à Paris en 1886, la ville ne jure que par le japonisme depuis une vingtaine d’années ! Il a déjà influencé les Nabis, mais aussi Degas, tout l’art moderne de son époque.
Très vite, par le marchand Bing, il achète des estampes peu chères qu‘il pense revendre lors d’expositions qu’il monte lui-même. Face à l’échec de ce projet, il se met à observer de plus près ces œuvres qui finissent par le convaincre que le japonisme est une voie à approfondir pour son travail.
Il part alors dans le sud de la France pour y trouver un Japon idéalisé. Très vite, sous l’influence d’Hokusai et de la nanga (des dessins d’origine chinoise réalisés par des Japonais), il reproduit les paysages provençaux sous forme de dessins sténographiques. Ils le confortent dans sa « peinture crépon » en référence aux « estampes crépon » des graveurs nippons. Il modifie les perspectives jusqu’à totalement les supprimer. Il élimine le modelé et surtout il peint avec des couleurs vives recherchant de grandes surfaces comme les aplats des estampes.
Le film, comme le livre, fait intervenir les plus grands spécialistes néerlandais, français et japonais, chacun analysant de son point de vue l’influence japonaise dans la peinture de l’artiste. Le film permet de déambuler d’un tableau à une estampe, de s’en approcher au plus près et d’en apprécier jusqu’à la texture. Les mouvements de caméra s’adaptent remarquablement à la composition des œuvres et rendent formidablement compte de la qualité de l’exposition.
Le livre, quant à lui, analyse, dans ses multiples détails, le cheminement de Van Gogh qui l’a amené à s’immerger dans l’estampe japonaise et à l’assimiler si bien à sa propre démarche qu’on ne la sent plus. De nombreux dessins, estampes et peintures appuient le propos des auteurs.
Le film et le livre se complètent admirablement, le premier nous montrant la montée en puissance de l’œuvre tandis que le second nous immerge dans cette explosion de couleurs qu’il a fait naître un peu malgré lui.
Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON
(1) lire notre chronique sur Enquêtes vagabondes : https://asiexpo.fr/enquetes-vagabondes-voyage-illustre-demile-guimet-asie-parait-chez-gallimard/
Van Gogh et le Japon de David Bickerstaff, 2019, 1h27, film-exposition sur grand écran, sortie au cinéma le 5 juin 2019. Notamment au cinéma Mourguet de Sainte Foy Les Lyon, séance les 20 et 22 juin. www.cinemourguet.com
Van Gogh et le Japon, 30 x 23 cm, cartonné, Actes Sud, 200 pages, avril 2018, 49€.