Une fois par an, la paisible ville de province italienne d’Udine se transforme en capitale européenne du cinéma asiatique. Fort de son fulgurant succès, cette huitième édition prouve une nouvelle fois la maîtrise d’une organisation parfaitement rodée et se pose en exemple à suivre.
Curieusement, Udine a cette année dû faire face aux mêmes difficultés que Hong Kong en voyant son budget annuel subir d’importantes coupes, alors que la manifestation ne cesse de prendre de l’ampleur. Les organisateurs s’avouent d’ailleurs tellement dépités, qu’ils ont d’ores et déjà menacé le gouvernement italien d’arrêter après la dixième édition, si jamais l’Etat ne revoyait pas sa copie d’allocations.
Entièrement au service et à l’écoute de son public, l’équipe soudée de bénévoles s’efforce de partager sa passion et de guider les spectateurs vers un choix très large de films. Le festival se déroulant sur une semaine, le gros des films est proposé dans une magnifique salle de 1200 places. Les séances commencent dès 10h pour se terminer après la projection de minuit. Les plus courageux pourront ensuite se défouler à l’une des nombreuses soirées dont les italiens ont le secret avant de repartir quelques heures plus tard pour les salles de cinéma. Les amoureux de films plus anciens (et souvent rares) pourront étancher leur soif dans une seconde petite salle. Regroupés sous forme d’une thématique précise (cette année: la comédie musicale), ils se recoupent malheureusement avec la matinale programmation officielle… posant parfois de sérieux dilemmes, tout film n’étant projeté qu’une seule fois.
De nombreux invités font le déplacement et se prêtent volontiers à des conférences thématiques organisées tous les soirs à 18h. L’accès est libre et donne souvent lieu à des débats enflammés sur des sujets aussi divers que l’actuelle comédie hongkongaise, les comédies musicales des années 60 ou la régulation des screen quotas coréens. Parmi les réalisateurs présents : Takashi Miike (Imprint), Wai Ka Fai (Shopaholics) ou le vétéran Inoue Umegutsu (Hollywood Nocturne).
Le choix des programmateurs inclut avant tout les dernières sorties de films populaires des principaux pays asiatiques ; peu de place donc pour le cinéma art et essai. Mais qu’importe : les coups de cœur sont là et bien là.
Hong Kong
Malgré l’exceptionnelle contre-performance du cinéma hongkongais en 2005, le festival d’Udine a réussi l’exploit de sélectionner pas moins de douze titres, excluant les meilleurs (Election 1, Chinese Tall Story et SPL) pour s’intéresser aux moyens comme aux très mauvais.
L’opportuniste Super Kid de Cha Chuen-yee, le combat d’un enfant à l’intelligence surdéveloppée contre des scientifiques, n’est (d’après les propres dires de son réalisateur) qu’un film pour enfants uniquement destiné au marché chinois. Au-delà de son action commerciale putassière, le film effraie par l’absence d’une quelconque implication de la part du cinéaste au sein d’une ennuyeuse intrigue sans aucun enjeu.
Dragon Squad était annoncé comme le “film de la dernière chance” pour son réalisateur Daniel LEE (Black Mask), qui enchaîne les échecs depuis quelques années. Film d’action décervelé tentant de profiter du succès de SPL, l’intrigue empreinte des plus mauvais actioners des années 80 ne casse pas trois pattes à un canard (sauf ceux en bois, abattus lors des comiques séances d’entraînement de tir de l’équipe plus chic que choc).
Le Far East Film Festival d’Udine est un vivier riche en surprises cinématographiques et sa relative proximité avec la France le rend très facile d’accès. Les récentes déclarations des organisateurs du festival de leur rapprochement avec le festival de Venise pour en assurer la programmation asiatique sont pour le moins prometteuses, à moins que de nouvelles coupes budgétaires ne mettent un brusque frein à cette belle initiative de promotion du cinéma asiatique…
Juillet 2006
Pays : Italie