Le jeune inspecteur Souta Aoba accompagné de sa supérieure arrive sur une scène de crime assez étrange. En effet ils trouvent un cadavre se tenant debout, presque entièrement consumé sauf la tête dont il manque un œil. Cette découverte bizarre est perturbée par l’entrée en scène d’une jeune fille un peu désinvolte, prenant des photos de tous les côtés, et encadrée par un autre policier lui servant de garde du corps. Aoba fera les frais de la détermination de ce dernier (un coup de poing sans sommation) avant de devoir retourner les voir pour travailler avec eux. En effet, le site où a eu lieu le crime étant sensible, peu d’effectifs ont été déployés dessus et ils vont devoir utiliser toutes les ressources disponibles. Il va donc se rapprocher de l’inspectrice Tachibana, qui dirige l’unité EIMO dont la fonction est de travailler sur la mémoire oculaire. Étant un organe directement en contact avec l’extérieur, l’œil a une capacité de mémoire étonnante, supérieure au cerveau car attentive au détail sans être perturbé par un état d’esprit ou des convictions. Cette méthode révolutionnaire et très controversée peut aider dans une enquête, mais les informations qu’elle livre ne peuvent pas pour le moment servir de preuves. Néanmoins le duo Aoba/Tachibana, plus le garde du corps le sergent Kasukabe, commence à enquêter en l’utilisant à fond. En remontant la piste de l’agresseur, ils vont découvrir quelqu’un d’autre qui était présent : un homme dont l’œil gauche est scellé par des fils et dont l’implication dans l’affaire est très étrange…
Après un premier titre paru en France dans lequel il n’était que le dessinateur (Kings of Shôgi), Jiro Andou revient avec un titre personnel et dans un style très différent. Il part d’un postulat qu’une partie du monde médical trouve plausible, la mémoire des organes, selon laquelle les « souvenirs » du donneur se transmettraient au receveur. Ici une technologie très avancée permet de récupérer les informations contenues dans l’œil d’un mort ou de créer un dossier complet sur quelqu’un à partir de la photo de ses yeux. Cette technique mise à part, nous sommes dans une classique série policière, un peu fantastique certes, mais au vu des éléments que nous avons, cela pourrait basculer dans le complot avec une trame beaucoup plus grande. Ainsi l’inspecteur Aoba a un lourd passé lié à une secte qu’il croyait disparue, alors que non selon les propres dires de leur adversaire, et étant à l’origine de sa vocation de policier. Elle y serait aussi dans l’étrange capacité de concentration qu’il possède avec un de ses yeux. Une mystérieuse organisation serait à l’œuvre, dont le but n’est pas encore dévoilé, mais employant l’hypnose ou un conditionnement mental ; elle pousse les victimes à agir au-delà de leurs limites morales (un policier commet des crimes) avant qu’elle se suicide. Si le scénario n’est pas encore très clair, les personnages sont intéressants, l’ambiance générale bien construite et l’intrigue tient en haleine. Il est trop tôt pour juger de la qualité de ce manga dont les bases sont cependant bonnes, surtout tout le concept de mémoire visuelle qui fascine, intrigue et fait peur à la fois. Reflet d’une société où l’accès à l’information est de plus en plus simple et la protection de la vie privée toujours plus difficile, il permettrait de connaitre la vérité pure, sans trucage, ce qui ne serait pas évident à gérer. A suivre.
Fabrice DOCHER
STORAGE (STORAGE : KEISHICHO GANKYU BUNSEKIHAN) volume 1 de Jiro ANDOU (2015)
Policier / thriller / fantastique, Japon, Komikku éditions, août 2017, 176 pages, livre broché 7.90 euros