Fidèles à notre exploration des littératures extrêmes orientales, nous présentons, ici, trois ouvrages fondamentaux de cette aire géographique. À savoir la Chine et l’Inde pour la poésie, le Japon pour un recueil de textes édifiants. Le tout édité en Folio sagesse ou bilingue.
Tout d’abord, les Élégies de Chu restituent pour la première fois en Chine, le ressenti personnel de l’auteur de façon explicite et nominative. En effet, Qu Yuan (environ 343 – 279 avant notre Ère) est bien connu. C’est un poète issu de la lignée des fondateurs du royaume de Chu.
Le recueil d’origine est constitué de dix-sept textes pour sa forme définitive dont les dix premiers sont vraiment de l’auteur. La présente traduction en propose trois.
L’auteur nous y confesse un double ressentiment. Celui d’être rejeté par l’être aimé et celui d’être incompris de son seigneur. La douleur de l’exil ajoutée à la disgrâce sentimentale exacerbe ces textes d’une sensibilité innovante et d’une élégance poétique inconnues jusqu’alors.
Chaque texte est donné en idéogramme. Sa transcription en pinyin nous rend sa sonorité originelle. Une traduction en français sur la page en regard permet au lecteur de s’immerger pleinement dans les affres qui tourmentent tant l’auteur. Un vrai régal !
Ensuite, nous nous transportons au Cachemire, en Inde du Nord plus exactement, avec La Centurie d’Amaru. Ces cent un poèmes nous dévoilent une œuvre lyrique en sanskrit du sentiment amoureux. Elle date du VIIe siècle.
Loin de la tragédie, le plus souvent, ces textes proclament une confrontation des amants dans des rituels de jalousie, de disputes ou de regrets sur la route de l’accomplissement.
Pour finir, nous abordons le pays du Soleil Levant avec quelques extraits de l’Anthologie d’histoires qui sont maintenant du passé, le Konjaku monogatari shû, œuvre magistrale compilée au début du XIIè siècle.
C’est une œuvre charnière parce qu’elle abandonne la comédie humaine de l’aristocratie impériale, comme le souligne Ryûnosuke Akutagawa, pour s’intéresser à ce qui constitue le Japon dans toute sa diversité.
L’éditeur a sélectionné quatorze textes des plus édifiants sous le titre de Légendes bouddhiques et autres contes surprenants. Fait novateur donc, ils s’attachent à relater les faits et gestes de l’ensemble des classes sociales dans tout l’empire, sur fond de morale bouddhiste. Cependant, petit à petit, celle-ci va se retrouver en arrière plan pour une mise en valeur des histoires seules. Comme si les compilateurs anonymes avaient pris plus de plaisir à raconter qu’à asséner une morale.
Bien qu’hétérogènes, ces trois recueils d’un passé révolu nous donnent à voir les tiraillements du monde avec acuité pour mieux appréhender notre présent.
Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON
Élégies de Chu, 160 pages, 7,50€. Folio Bilingue.
La Centurie d’Amaru, Poèmes amoureux de l’Inde ancienne, 112 pages, 3,50€. Folio Sagesses.
Légendes bouddhiques et autres contes surprenants, 128 pages, 3,50. Folio Sagesses.