En quinze ans, et soixante-dix films, Maggie Cheung a tout joué. Dans tous les styles et tous les répertoires, ou peu s’en faut. Et en quatre langues. Récompensée par un prix d’interprétation international à Venise, reconnue comme une valeur sure du box-office Hongkongais, Maggie garde pourtant la tête sur les épaules, refusant le statut de star, et revendiquant celui d’actrice.
On pourrait croire à de la fausse modestie. Et bien pas du tout. Après des années de galère, Maggie a une vision plutôt saine du métier d’acteur et de l’illusion du statut de star.
Signée après avoir remporté un concours de beauté, en 1982, à 19 ans, Maggie enchaîne les séries télés, les films de série B et les rôles de potiches pour Jackie Chan. Entre 1984 et 1989, elle participe à pas moins de 32 longs métrages, dont 12 pour la seule année 88 !
Malgré tout, cette année lui offre ce qu’elle considère comme son premier “vrai” rôle, dans le “As tears goes by” de Wong Kar-wai. Dès lors, Maggie se débrouille pour décrocher des rôles intéressants, tout en gagnant sa vie dans des productions moins valorisantes. peu à peu, sa filmographie s’orne de titres de grande qualité : Full Moon in New York (Stanley Kwan / 1989), Song of the Exile (Anita Hui/1990), Nos Années Sauvages (Wong Kar-wai/1990), …
Au début des années 90, Maggie va passer un cap en remplaçant Anita Mui dans le bouleversant Centre Stage de Stanley Kwan. Maggie incarne, de façon stupéfiante, Ruan Lyu, star du muet de Shanghaï suicidée à 26 ans. Sa prestation lui vaut une reconnaissance internationale et elle remporte l’Ours d’Ors en 1992.
Enfin considérée comme une actrice, et suffisamment connue pour remplir les salles, Maggie trouve des rôles à sa mesure, en partie grâce à Tsui Hark. Celui-ci en fait la co-vedette de L’Auberge du Dragon, aux côtés de Lin Chin-hsia et de Tony Leung Kar-fai, puis du remarquable Green Snake, dans laquelle elle remplace encore Anita Mui. C’est avec cette dernière et Michelle Yeoh qu’elle tourne Heroic Trio et sa suite, deux films artistiquement mineurs mais qui ont fait beaucoup pour sa notoriété internationale. Enfin, elle retrouve Wong Kar-wai, et une flopée de vedettes, pour sa grande fresque épique, Les Cendres du Temps. Puis, elle accepte une proposition, plutôt étrange, d’un réalisateur français. Elle ne se doute pas, alors, que cette rencontre va changer, non seulement sa carrière mais surtout sa vie.
Irma Vep, d’Olivier Assayas (Désordre, La Page blanche et plus récemment HHH) n’est pas un succès commercial. On sent même, clairement, les doutes et les déceptions de l’homme derrière la caméra. Mais Maggie, elle, est simplement incroyable.
Augustin, roi du kung-fu (Anne Fontaine/1999) annonce l’installation, durable, de Maggie en France, au côtés d’un Olivier Assayas qu’elle épouse bientôt, abandonnant tout espoir de retour à Hong Kong, où une actrice mariée est une actrice est à la retraite.
Annoncée (prématurément ?) comme vedette du Journal d’une geisha de Spielberg, on l’imagine mal rester longtemps à Hollywood, patrie du star-system, où elle serait, de toute façon, condamnée à jouer les chinoises (un rôle remplit actuellement par l’Hawaïenne Tia Carrere !).
Un univers qui semble bien loin des valeurs de la tranquille Maggie (désormais) Assayas.
Pays : Hong-Kong