Les éditions GOPE ont eu la bonne idée de republier ce grand classique de la littérature thaïlandaise dans une traduction fluide accompagnée de notes qui font comprendre aux lecteurs les subtilités de cette culture.
Dans les années 30, à Bangkok, la jeune Wimon vit dans une riche famille patricienne. Elle a les occupations désinvoltes de son milieu jusqu’à ses 21 ans. A ce moment-là, le décès de son père fait basculer le foyer dans la pauvreté.
Par testament, elle est contrainte d’assumer la charge familiale. Elle doit alors travailler, louer la grande maison qu’elle occupait et vivre chichement avec toute la fratrie issue des nombreux « lits » du dit père. Elle choisit cependant de ne pas se faire aider par les autres membres de la famille, supportant seule tous ces désagréments.
C’est en fait le principal sujet de Dokmaï Sot. La vraie noblesse n’est pas celle de la naissance : sociale et matérielle ; mais celle du cœur : morale et spirituelle. En effet, Wimon fait passer le devenir de ses proches avant le sien. Elle agit selon sa conscience sans se soucier du « qu’en dira-t-on » ni des traditions. Elle va même jusqu’à s’oublier elle-même. En cela elle répond à des valeurs fermement imprégnées de bouddhisme. Le titre original du roman est d’ailleurs Phou Di : « personne de grande valeur ». Il est inspiré d’une parole de Bouddha : « Si quelqu’un est appelé Phou Di, c’est à ses actes qu’il le doit. »
Un autre thème intéressant du roman est la place des femmes dans la société thaïlandaise des années 30 en pleine mutation moderniste. Le royaume de « Siam » à la monarchie absolue disparaît au profit de la « Thaïlande » à la monarchie constitutionnelle. Les parents se posent alors la question de l’éducation des filles : doivent-ils « les élever de façon libérale ou les tenir serrées ? ». Le frère aîné de Wilmon fait des études en Angleterre tandis qu ‘elle attendait de se marier…
Photographie d’une époque, le roman surprend le lecteur opiniâtre à l’avant-dernière page où plusieurs révélations se font jour…
Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON
Les Nobles, Dokmaï Sot, roman traduit du thaï par Wanee Pooput et Annick D’Hont, 380 p.19,95€ , novembre 2018. GOPE éditions.