A la fin de sa vie, l’éminent professeur de neurologie de l’Ecole supérieure de Kyoto, le professeur Shimamura, vit reclus chez lui. Il se remémore deux événements particuliers de l’aube de sa carrière, qui l’ont totalement réorientée. Le premier se passe dans le village de Shimane. Le tout jeune médecin en neurologie y étudie une épidémie de possession par le renard. (Situation très courante au Japon.) En d’autres termes d’hystérie féminine. Il y rencontre un cas très intéressant où un renard semble de lover sous la peau de Kiyo, une jeune fille dont il étudie les symptômes. Dans une nuit d’instabilité mentale, cette dernière et l’étudiant qui l’accompagnait disparaissent en lui laissant un fardeau qui décidera de sa vie. Boursier de l’Académie de médecine du Japon, le jeune docteur Shimamura part ensuite étudier en France l’hystérie, auprès du Professeur Charcot, le plus grand spécialiste de l’époque. C’est lors d’un de ses fameux mardis, que le second événement a lieu. Nous ne le dévoilerons pas…
Après son retour au Japon, deux ans plus tard, Shimamura se met en retrait de son activité médicale pour n’être plus que professeur et enseigner la neurologie plutôt que de la pratiquer…
Dans un style sobre et descriptif, mais aussi espiègle, Christine Wunnicke s’amuse à mêler le réalisme du rationalisme scientifique de Shimamura et sa perception étonnamment fantasque voire fantastique. En effet, le roman est écrit, en grande partie, à la première personne, du point de vue du professeur. Il a des souvenirs approximatifs de sa vie, se moque de leur réalité comme si l’autrice sapait les fondements cartésiens de son existence. Nous amenant ainsi à penser que le côté fantastique de l’existence est peut-être plus intéressant que son côté rationnel, tout au moins pour ce scientifique japonais. Le roman est ainsi drôle et détaché, nous faisant pénétrer dans les arcanes de la culture nippone de la fin du XIXè début XXè siècle. Il nous convie aussi à méditer sur la manière dont on perçoit une société selon sa propre culture.
Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON
« Le renard et le Dr Shimamura », Christine Wunnicke, 176 p.,21,50€, 15,99€ en numérique ; En librairie le 4 septembre.