LA SALLE D’ATTENTE de TSOU Yung-Shan

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  Pour pouvoir rester en Allemagne, Xu Mingzhang doit renouveler son visa. Il se retrouve alors dans une salle d’attente pour l’examen de son dossier. Venu ici après son mariage à cause du travail de sa femme, il est aujourd’hui perdu suite à leur séparation. Il ne sait plus ce qu’il veut, ce qu’il doit faire : doit-il rester ou rentrer ? Changer de voie ou continuer ce qu’il fait ? Eternel indécis depuis qu’il est petit, il est aujourd’hui dans une situation où il ne peut plus en sortir seul. Il doit se forcer à réfléchir sur lui-même mais en a-t-il vraiment la force ? Alors qu’il attend dans cette salle froide et sans âme, va-t-il réussir à se confronter aux personnes qu’il doit rencontrer ? Arrivera-t-il à poser ses choix ?

  En partie autobiographique, ce roman met en scène un expatrié qui se pose des questions sur son avenir loin de son pays natal. Très loin de tout, les personnes dans son cas doivent souvent réfléchir sur leur avenir. Outre la barrière de la langue, il y a celle de la culture ainsi que les attentes que le pays d’accueil peut avoir pour lui. A cela s’ajoute, pour notre protagoniste, un caractère très passif, très indécis ; cela complique évidemment beaucoup les choses. Si sa femme a été attiré au départ par sa façon d’être, celle-ci est également la cause de leur séparation. Cela ne l’a pas empêché de venir en Allemagne ; mais beaucoup de non-dits ont amené une situation qui n’était plus supportable entre eux deux. Et maintenant que va-t-il pouvoir faire ?

  Loin d’être édulcoré, ce roman met en scène les difficultés rencontrées par les expatriés. Ils sont incarnés ici par Xu Mingzhang mais aussi un couple qui le logera un moment, ainsi que les voisins de son futur appartement. Nous rencontrons aussi d’autres personnages marqués par la vie ; à un moment ou à un autre ils auront fait des choix (ou ne les auront pas faits) ce qui fera naitre regrets et envies. Notre existence n’est jamais simple : des décisions doivent être prises, pour que nous puissions grandir, travailler, poser notre empreinte ou juste survivre. Le prix n’est-il pas parfois cependant trop lourd à payer ?

  Très sombre, ce roman n’a pas de happy end. Le protagoniste évolue après avoir surmonté plusieurs traumatismes. Il fera des retours en arrière après des tentatives pour s’émanciper et il lui faudra rencontrer les bonnes personnes, au bon moment, pour avancer vraiment. Les autres personnages rencontrés sont eux-aussi dans des situations plus ou moins problématiques. Celles-ci apportent des réflexions entre les rêves er la réalité, entre ce que l’on a, ce que l’on veut avoir et ce qu’il est possible d’avoir, sans certitude. Par cette tournure (réaliste) sans compromis, l’histoire se veut très réaliste, voir désespérée.

  Mais il y a un petit problème : l’écriture. Est-ce dû au fait qu’il s’agisse du premier roman de Tsou Yung-Shan et/ou à la traduction ? La lecture est parfois compliquée : phrase très longue dont on perd le sens, manque de ponctuation, enchainement d’idées qui finissent par s’emmêler sans raison, certains passages sont difficilement compréhensibles et pénibles à lire. Difficile de vraiment déterminer la cause mais probablement le manque de recul de l’auteur. Encore une fois le sujet est intéressant ; son traitement sans compromis évitent la mièvrerie, donnant une vision parfois peut agréable de l’Allemagne et des émigrés. Ceux qui oseront franchir le pas, il en reste une histoire, ou plutôt des histoires qui sont poignantes.

Fabrice Docher

LA SALLE D’ATTENTE (DENGHOU SHI) de TSOU Yung-Shan (2013)

Drame / tranches de vie, Chine / Allemagne, éditions Piranha, septembre 2016, 192 pages, livre broché 17 euros

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