Dragon Inn, aussi connu sous le nom de Dragon Gate Inn, sorti en 1967 du réalisateur Taïwanis King hu, est un Wuxia – film de sabres sur le thème du chevalier errant et mettant en scène un certain contexte politique. Ce film précède A Touch of zen sorti en 1970 et tous deux abordent des thèmes très similaires mais d’une manière assez différente. En effet on peut remarquer que A Touch of Zen est plus romanesque et que le réalisateur s’attarde beaucoup plus à la narration et sur les paysages bucoliques qui composent le film.
Dans Dragon Gate Inn (Auberge de la porte du dragon) le pouvoir est entre les mains des Eunuques. Le ministre Yu, ayant été mis à mort pour trahison, ses enfants deviennent la cible du maître des Eunuques. Des assassins et protecteurs se retrouvent simultanément engagés et l’auberge de la porte du dragon devient le théâtre des pires fourberies.
Le film commence in medias res avec un conflit et une musique tonitruante : le ton est donné. Une voix off est là pour donner des indices sur l’intrigue qui va suivre en dévoilant les tenants et aboutissants du conflit politique. Un régime de terreur a été mis en place et c’est ainsi que commence cette histoire de poursuite.
On retrouve des éléments assez classiques qui font le cœur du genre Wuxia. Le chevalier solitaire, errant et mystérieux qui arrive à l’auberge. Doué de réflexes impressionnants et d’une excellente maîtrise des arts martiaux, seul contre tous, on comprend très vite qu’il fera parti du camp des protecteurs de Yu.
Les frères et sœurs Yu ne sont présentés qu’après cela et toute l’introduction du film est là pour installer ce climat de menace qui plane sur eux, tout en leur accordant de l’espoir en la personne du « chevalier errant » (Shih Chun).
L’intrigue assez manichéenne, met en parallèle la fourberie des antagonistes face à des protagonistes malins et agiles qui sont très souvent inférieurs en nombre contre leurs ennemis. Le Maître Eunuque commettra l’ultime coup bas ou – très littéralement – l’ultime coup dans le dos du chevalier errant, qui le mènera évidement à sa perte.
Le film se construit sous forme de « road trip » semé d’embûches et rythmé par les viles attaques des opposants de nos héros. L’auberge étant à la fois un point de départ, un point culminant (les attaques et pièges mis au point pour tromper l’ennemi) et un point de rencontres – malencontreuses.
On retrouve des éléments récurrents chez King Hu dans la composition de l’image, avec des plans sur la nature tantôt hostile, tantôt dénaturée par l’invasion Eunuque. Au fil de cette route, les plans dévoilent une nature immense et des protagonistes minuscules, à sa merci comme à celle des ennemis. Les combats de sabres sont, comme dans A touch of zen, tels des danses au point de dérouter le Maître Eunuque. Ce dernier étant la « dernière étape » de ce voyage initiatique, l’infériorité numérique des héros s’inverse face à lui afin de montrer son pouvoir et sa puissance. La musique, quant à elle, rythme aussi le film, soutenant une tension presque palpable dans les moments les plus critiques.
Dragon Inn est un film qui dépeint un voyage initiatique s’inscrivant dans un contexte politique conflictuel. Les codes du Wuxia y sont ancrés et il installe une base solide pour ce qui va être par la suite A Touch of Zen.
Gwen Ruby
DRAGON INN (LONG MEN KE ZHAN)
De King HU (1967) avec Shang Kuan Ling-Feng, Shih Chun, Bai Ying, Hsu Feng…
Action / aventures / drame, Taïwan, Carlotta Films, septembre 2016, 107mn DVD / 111mn Blu-ray, couleur, version restaurée, 20 euros