Siège du F.T.I.I (Film & Television Institute of India) et du N.F.A.I (National Film Archives of India), la charmante petite ville de Pune, prononcer Pouné (Poona avant l’Indépendance) était un terrain idéal pour le P.I.F.F (Pune International Film Festival).
Ville universitaire appelée aussi Oxford de l’Est, Reine du Deccan, elle fourmille de jeunes étudiants évoluant au sein des contrastes comme peut en offrir l’Inde : Garçons et filles, jeans et T-shirt moulant, punjabis colorés (mais jamais de jupe…), se donnent la main dans la rue, croquent les salades d’oignons sur les trottoirs défoncés ou dégustent un tchai (thé au lait sucré) dans un café sur fond de musique indienne et occidentale.
Chevauchant des nuées de scooters et de motos, ils traversent la ville moite, sa pollution et ses bidonvilles, sa rivière Mutha Mula qui, à cette saison, charrie plus de déchets que d’eau, et vont au cinéma, à l’E-square ou à l’Inox, multiplexes géants où la musique est à fond.
Ils aiment l’art, la culture et le cinéma ! De nombreux festivals sont organisés à Pune : danse, musique et, cette année, du 15 au 22 mars, l’Etat du Maharashtra et le Gouvernement Indien offrent aux Punéites et à leurs hôtes, leur 5e Festival International de Cinéma.
Sous la responsabilité de M. S. Kalmadi et du Dr. J. Patel, lui-même réalisateur de films dont le célèbre Dr. BabaSaheb Ambedkar, le comité de sélection a choisi les films selon huit catégories.
Deux catégories sont compétitives : Competition World Cinema et Competition Marathi Cinema dans laquelle concourent six films produits dans l’état du Maharashtra. Les autres catégories sont Films from round the World, Country Focus où la France est bien représentée, Retrospective, en particulier autour de Mani Ratnam actuellement très en vue dans le cinéma indien, Tribute avec hommage notamment à feu Hrishikesh Mukherjee, Indian Bioscope qui propose des découvertes de films indiens de l’année, Golden MIFF : sélection de fictions et documentaires présentés à Mumbai et F.T.I.I. : films d’étudiants de l’Institut.
Volver (Espagne) ouvre le bal après une cérémonie d’ouverture fastueuse avec des invités de marque : Urmila Matondkar, Sunil Shetty, Mani Ratnam, allumant la grande lampe à huile qui éclairera le Festival.
165 films au total sont projetés tout au long de la semaine dans trois espaces : les multiplexes E-Square et Inox, et le N.F.A.I.
La remise du Lifetime Achievment Award aux deux stars consacrées de Bollywood : Dharmendra (Sholay) et Asha Parekh (Tulsi tere angan ki) est un moment plein d’émotions, avec une rétrospective retraçant la carrière de chacun d’entre eux. Asha Parekh est charmante et Dharmendra, un éternel play-boy !
La remise des prix un peu longue, est accompagnée de cadeaux pour chacun : chapeaux et écharpes traditionnels de Pune…
Meilleur réalisateur : Costa Gavras pour Le Couperet (France), Meilleur long métrage pour The Old Barber (Chine), Meilleure actrice : Jingchu Zhang dans The Road (Chine), Meilleur acteur : José Garcia dans Le Couperet, Prix Spécial du Jury pour The Road (Chine), trois mentions spéciales du jury : Andrzej Chyra dans The Collector (Pologne), Willem Van De Sande, réalisateur de A thousand kisses (Pays Bas), Sashi Paravoor, réalisateur de Nottam (Inde). Malheureusement, la plupart des lauréats sont absents, notamment les Français et c’est le directeur de l’Alliance Française qui reçoit chapeau, écharpe et applaudissements.
Meilleur film Marathi : Shevri et deux mentions spéciales, l’une pour l’actrice Devika Daftardar dans Nital , l’autre pour le directeur de la photographie Debu Deodhar dans Maati Maay.
Les spectateurs croisés sont intéressés par les films provenant de France (l’un d’eux nous affirme que son acteur favori est Jean Reno…), de Chine et d’Iran mais leurs préférés sont, de loin, Iruvar et kannathil muttamittal de Mani Ratnam. Ils sont nombreux, et délaissent tout le reste, à la conférence de presse qu’il donne à l’E-Square.
Peu d’étudiants du F.T.I.I. participent ou même, fréquentent ce festival. Ils sont plus mobilisés par le Prabhat festival, qui présente des films d’étudiants et se déroulera au F.T.I.I. le mois prochain. Quelques uns réussissent cependant à s’introduire au cocktail “on the roof top” (avec la complicité de deux Français d’Asiexpo…), surtout pour profiter du dîner et du champagne entre copains.
Quant aux vieux films indiens projetés au N.F.A.I., ils ne déplacent pas les foules : “ces films là, on peut les voir facilement à la télévision”.
Dans les coulisses, le contraste oblige : une organisation complètement chaotique. Certains films ne sont pas arrivés de Mumbai (et n’arriveront jamais…), le programme est distribué à J2, le catalogue à J4 donc loupé pour certaines séances et on peut se demander combien de spectateurs ont pu voir les films d’étudiants projetés au premier matin. L’accueil est plus ou moins chaleureux, voire glacial, selon la notoriété de l’invité (nous avons été témoins de la détresse d’un jeune réalisateur venu de la région de l’Assam présenter son film à une séance où il n’y avait aucun représentant du PIFF et seulement trois spectateurs…).
Nous sommes rentrés légèrement plus sourds qu’avant à force d’entendre la musique constamment à fond dans les multiplexes, n’avons pas échappé aux troubles digestifs après ingestion d’hamburger végétarien dans les mêmes multiplexes, mais, malgré la communication complètement défaillante, avons participé, ravis, à quelques conférences de presse inoubliables, dont celle du grand ” Mani Sir ” et…avons vu quelques films.
Et puis, le grand plaisir de découvrir Pune : son Aga Khan Palace devenu le Gandhi Memorial où sont retracées la vie et l’action de Gandhi, ses ruelles bruyantes et colorées, animées et commerçantes, celui de craquer pour les noix de coco vertes plus goûteuses que la mineral water ou pour les saris chatoyants de Kala Niketan et les bracelets en verre de Lakshmi Road, les disques et les DVD de Crossword, sans parler des émotions qu’elle nous faisait vivre et le constant décalage avec nos habitudes.
Et enfin, nous avons eu l’honneur de présenter Asiexpo à toutes les personnalités rencontrées ainsi qu’à la presse indienne : Lisez la première page de The Indian Express, Pune Lines, 22 mars 2007 ?…
Pune, avril 2007
Pays : Inde