Yasuzo Masumura, l’extase et l’agonie en 6 films, aujourd’hui au cinéma.

Yasuzo Masumura (1924-1986) n’est pas le plus connu des cinéastes japonais. Et cette rétrospective de 6 de ses films, de 1964 à 1969, proposée par The Jokers, est bienvenue en cette fin d’été torride.

Cinéaste emblématique de l’après-guerre, il a contribué à renouveler les thèmes et le ton du 7è art japonais. Après un séjour de 1952 à 1955 au Centro Sperimentale di Cinematografia de Rome, ses thématiques sont largement influencées par le cinéma occidental. Il ramène aussi avec lui une image très italienne de l’actrice : elle est belle, elle a de la superbe et de la détermination face aux lâchetés du monde réel.

Cette idée s’incarne lors de sa rencontre avec l’actrice Wakao Ayako lors du tournage de La rue de la honte. Il entre, en effet, aux studios de la Daiei en 1955 et devient l’assistant réalisateur de Kenji Misoguchi sur ce film entre autres. Ayako va jouer dans une vingtaine de films de Masumura dont 5 des 6 présentés dans cette rétrospective. Elle y incarne à la perfection la vision du monde du cinéaste en déclinant les rapports de domination intra et surtout inter sexes, l’ambiguïté de la fonction érotique : le charme, le calcul ou l’asservissement et puis surtout l’expression des désirs comme affirmation de soi.

Voilà résumées les thématiques bien peu consensuelles au pays du soleil levant. Masumura les prend à bras-le-corps à travers des adaptations littéraires des années 30, le plus souvent. C’est le sens de la provocation, de l’irrévérence et même de la farce d’un Tanizaki Junichiro ou d’un Edogawa Ranpo qui intéressent particulièrement le cinéaste. Mais pour cela, il ne claque pas la porte des studios comme le fera Oshima pour aller vers un cinéma indépendant et même militant. Non, il réforme le système de l’intérieur en bousculant les traditions et en imposant un style à la sensualité exacerbée, mêlant Eros et Thanatos, particulièrement dans La bête aveugle. La place de la femme y est omniprésente et même si elle se soumet de façon sacrificielle ( dans L’ange rouge ) à son devoir comme dans La femme de Seisaku, elle affirme ses désirs et s’impose dans son individualité par la vengeance dans Tatouage ou la passion interdite.

Matsumura, féministe avant l’heure !

Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON

Yasuzo Masumura, l’extase et l’agonie en 6 films : Passion (1964) / La femme de Seisaku (1965) / Tatouage (1966) / L’ange rouge (1966) / La femme du docteur Hanaoka (1967) / La bête aveugle (1969). Le 27 août au cinéma.

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