Dans une rue animée d’un quartier populaire japonais, deux restaurants se font face et se vouent une concurrence féroce. Le Mama-Miya, une enseigne familiale, se débat difficilement contre un franchisé, le Romanée-ya, qui cherche à l’intégrer à son groupe, sinon à provoquer sa faillite. C’est alors qu’un individu sans le sou débarque dans les deux restaurants, en quête d’un repas qu’il paiera en travaillant. Tandis que le second le déboute, le Mama-Miya l’accueille de manière courtoise. Or, il se trouve que l’inconnu s’y connaît plutôt bien en vins, ce qui va permettre à ses hôtes de remonter la pente. Vous l’aurez compris, il ne s’agit pas de n’importe qui, mais bien de notre cher Shizuku Kanzaki, de retour après un voyage initiatique d’un an tout autour du monde.
Alors que la série Les Gouttes de Dieu s’achevait sur la quête des douze apôtres, il restait encore un chapitre à écrire pour conclure cette histoire : révéler l’identité du breuvage divin lui-même. Cependant, Tadashi Agi et Shu Okimoto ont décidé de laisser maturer en cave la question principale, en revenant avec cette nouvelle histoire, « Mariage ». Comme son nom l’indique, les auteurs ne s’intéresseront plus seulement aux vins, mais aussi à la gastronomie en général, et surtout aux associations les plus réussies entre ces deux mondes.
Ainsi, dans ce premier tome, Shizuku nous revient comme nous l’avions découvert à ses débuts, faisant une démonstration de ses talents olfactifs comme de la précision de ses gestes. Et comme dans le récit d’origine, notre héros met ses capacités au service des plus démunis. Cette intrigue locale permet aux auteurs d’aérer et d’exposer leur nouveau concept. De l’espionnage mutuel, pour observer les travers des uns et des autres, jusqu’aux réajustements et aux idées originales, la narration se fait toujours aussi didactique qu’exhaustive. L’aspect humain n’est pour autant pas mis de côté, la résolution du conflit permettant également de dénouer certaines querelles personnelles entre les employés des deux enseignes. On regrettera cependant que les propriétaires d’en-face soient présentés de manière caricaturale, au service du profit avant tout.
C’est bien gentil tout ça, mais qu’en est-il de notre question principale ? Sur ce point, la fin du tome nous rassure… du moins, en partie. Car si l’on retrouve bien notre casting favori, et que l’objectif des Gouttes de Dieu reste en ligne de mire, il faudra cependant que les deux prétendants traversent une nouvelle série d’épreuves pour pouvoir l’atteindre. On y verra une manière assez grossière de rallonger la sauce, tout en offrant au « Mariage » un temps d’exposition important. Mais pour combien de temps encore ?
Alain Broutta
MARIAGE – LES GOUTTES DE DIEU (MARIAGE – KAMI NO SHIZUKU SAISHÛSHÔ)
volume 1 de Shû OKIMOTO et Tadashi AGI (2015)
Gastronomie / Tranche-de-vie, Glénat – Seinen, septembre 2016, 190 pages, livre broché 9.15 euros