L’intrigue nous plonge dans les bas-fonds de Hong Kong. Un tueur coupe la main gauche des femmes qu’il viole et assassine. Un duo de flics antinomiques est sur le coup. Cham Lau est un sensoriel instinctif, à vif et toujours sur le qui vive. Tandis que le jeune Will Yam au physique de 1er de la classe, promu chef, se veut toujours réglementaire. Mais sa rage de dent va le faire dérailler… Il faut dire que le film est l’adaptation du roman de Lei Mi Dents de sagesse.
Par l’intermédiaire de Wong To, une jeune délinquante, leur enquête les mène dans le ventre de la ville avec ses ordures, ses drogués, ses trafiquants en tous genres, ses marginaux et ses lieux insalubres.
Le réalisateur filme les lumières de la ville toujours au loin, en plan large, comme inatteignables. Mais l’action se situe uniquement dans les marges, à l’étroit, en plans serrés sur la déliquescence urbaine et ses laissés pour compte. On est dans les limbes (Limbo), les entrailles de la ville. Une esthétique totalement oppressante, avec en outre, la pluie, le vent comme toile de fonds aux poursuites, traques et bagarres. Elles rythment l’intrigue à grande vitesse. Pas de temps mort durant ces presque 2 heures.
Les temporalités décalées contribuent aussi à tenir le spectateur en haleine. La scène inaugurale ne prend sens, par exemple, qu’à la fin du film. Le réalisme importe peu dans ce thriller. C’est l’efficacité du plan, de l’image, du noir et blanc grandiose qui permet d’être de plain pied dans ces déchets mis en scène. Les combats sont étirés au maximum, un peu trop d’ailleurs. Il en reste une esthétique de la brutalité, de l’animalité.
Il est question de culpabilité, de rédemption, d’immigration, de traumatismes aussi. L’arrière plan de l’intrigue policière, du film d’action est intéressante mais peu fouillée. La fin est très noire car de rédemption il n’y en a pas dans ce monde-ci.
Le film a gagné le grand prix de la critique au festival du film policier de Reims. Gageons qu’il enchantera les soirées estivales des salles obscures
Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON
Limbo, scénario de Au Kin Ye et Shum Kwan Sin et réalisation de Soi Cheang, avec Lam Ka Tung alias Gordon Lam, Cya Liu, Mason Lee, 1h 58, en salle le 12 juillet.