L’art moderne en Indochine de Charlotte Aguttes-Reynier paraît aux éditions In Fine.

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Charlotte Aguttes-Reynier est commissaire priseur dans la société de son père. Elle est spécialiste de l’art moderne. En 2014, par hasard, elle est confrontée à une peinture sur soie représentant une scène de thé : le tableau de la couverture de son ouvrage. Elle est subjuguée et se lance alors dans des recherches sur l’auteur : Lê Phô (1907-2001). Par la suite, elle concrétise une belle vente aux enchères de cette œuvre. Elle apporte ainsi reconnaissance et notoriété à l’artiste. Mais elle ne s’arrête pas en si bon chemin. Elle investigue et finit par découvrir les beaux-arts de l’Indochine (EBAI). Il s’agit d’une école fondée en 1925 à Hanoï par Victor Tardieu et qui dura 20 ans.

L’autrice fonde alors « l’association des artistes asiatiques à Paris » en 2019. Grâce à ses nombreuses années de rencontres et de découvertes au service de la connaissance de l’EBAI, elle en devient la principale experte.

Dans son fastueux ouvrage, l’art moderne en Indochine, Charlotte Aguttes-Reynier nous fait découvrir cette école. Après un historique conséquent et très documenté de sa fondation, elle nous restitue l’atmosphère de l’époque. Mais les contingences géopolitiques de 1945 marquent un coup d’arrêt à son fonctionnement. Il n’en est pas moins vrai qu’elle a produit un nombre conséquent d’artistes. De nombreuses œuvres d’anciens étudiants constituent ainsi le cœur de l’ouvrage. Et pour une grande part, leur vie individuelle nous est dévoilée dans cette monographie.

Pour terminer son large tour d’horizon de l’art indochinois, l’autrice revient à son métier d’origine, la vente aux enchères. Elle porte ainsi à notre connaissance quelques chiffres et graphiques sur l’importance que prend ce genre pictural de par le monde, désormais. Grâce lui en soit rendue. Elle qui s’est totalement investie pour la reconnaissance de cette école. On le ressent chaleureusement en découvrant ce livre passionné et passionnant.

Parmi les nombreux artistes présentés, trois ont particulièrement retenu notre attention. Lê Quôc Lôc pour sa très grande maîtrise de la laque. Lê Thi Luu, par sa sensibilité, nous rappelle les œuvres de Marie Cassat ou de Berthe Morisot. Trân Phu Duyen, pour ses laques ainsi que ses rehauts d’or, du meilleur effet. Ils restituent subtilement la luxuriance de la nature de son pays.

À noter aussi que le choix judicieux d’un grand format d’édition permet au lecteur d’apprécier pleinement la finesse et le raffinement des arts. Il rend ainsi un hommage tardif mais sincère à ces nombreux précurseurs asiatiques.

Admirons tout autant le bel effort éditorial des éditions in fine qui publient l’ouvrage en trois langues : le français, le vietnamien et l’anglais.

Avec une telle ouverture d’esprit, il n’y a plus de raison de méconnaître ces artistes.

Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON

L’art moderne en Indochine, Charlotte Aguttes-Reynier, format 22 X32 cm, trilingue, 432 pages, 75€, éd. In Fine.

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