La forêt de flammes et d’ombres d’Akira Mizubayashi paraît chez Gallimard.

Akira Mizubayashi nous convie à nouveau à écouter sa petite musique. En 2019, il avait consacré un roman au violon, Âme brisée. Il reçut de nombreux prix et les éditions Gallimard le rééditent en une version somptueusement illustrée de 45 tableaux « musicaux » de grands maîtres du XXè siècle (1). En 2022, c’était Reine de cœur et l’alto. Puis, en 2023 le violoncelle avec Suite inoubliable (2).

La forêt de flammes et d’ombres, son dernier opus, réunit, au cœur du roman, la peinture et la musique à travers un autre trio, plus jeune, que celui d’Âme brisée. Ren est étudiant aux Beaux-Arts comme Yuki, tandis que Bin, qui marche mal, étudie le violon. Ils se rencontrent à la poste de Ueno où ils travaillent en extra en cette fin d’année 1944. Ils s’apprécient beaucoup, mais Ren est bientôt appelé sous les drapeaux.

Envoyé en Mandchourie comme artiste pour soutenir l’effort de guerre, son trait ne dépeint qu’épuisement et désespoir sur le front. Il ne correspond absolument pas à la doxa du gouvernement. Il est alors renvoyé et devient simple soldat. Gravement blessé, il perd ses 2 mains. Ren s’enfonce alors « dans le néant ».

C’est grâce à l’amitié de Bin et à l’amour de Yuki qu’il reprend peu à peu goût à la vie. Et que, malgré toutes les horreurs subies à la guerre, il va continuer à peindre et en rendre compte dans une suite de 15 tableaux : La fameuse forêt de flammes et d’ombres.

La prose d’Akira Mizubayashi se fait souvent poétique et l’on y reconnaît Rimbaud, Apollinaire quand il parle de la guerre. Ailleurs, son écriture est classique, finement maîtrisée et chatoyante. Les nombreuses synesthésies à l’œuvre permettent de rendre compte aussi bien des peintures que des morceaux musicaux interprétés par Bin. En outre, par l’introduction des journaux respectifs de ses personnages, il fait le tour des ressentis de chacun et multiplie les interprétations enflammées des œuvres.

Le roman est aussi l’occasion de rendre hommage à l’Europe. Bin s’est exilé à Genève, Yuki finit par rejoindre sa fille qui vit à Paris. C’est là qu’elle fera découvrir les tableaux de Ren et résonner la musique de Bin. « Leur présence d’exilés au cœur de l’Europe » est un choix assumé.

Une belle réflexion sur l’art et sa puissance créatrice capable de nous guérir de tous nos maux.

On peut aussi l’écouter dans la collection  Écoutez Lire.

Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON

(1) Âme brisée d’Akira Mizubayashi, 19 X 24 cm, 232 pages, 29€, éd. Gallimard. En librairie le 11 septembre 2025.

(2) Lire notre chronique : https://asiexpo.fr/suite-inoubliable-dakira-mizubayashi-parait-chez-galimard/

La forêt de flammes et d’ombres d’Akira Mizubayashi, 256 pages, 20€, éd. Gallimard. ou coll. Écoutez Lire , 17,90€. En librairie depuis août 2025.

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