Déchéance d’un homme et Goodbye de Dazai Osamu dans une nouvelle traduction.

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Didier Chiche termine son travail de traduction des œuvres de « l’enfant terrible » des lettres japonaises, Dazai Osamu, pour les éditions des Belles Lettres (1). Elles proposent ainsi une réédition de ses 2 derniers romans : Déchéance d’un homme et Goodbye. Ce dernier étant demeuré inachevé en raison du suicide de son auteur en juin 1948.

Le 1er se présente sous forme de 3 cahiers encadrés d’un prologue et d’un épilogue. Un narrateur fictif , Yôzô, y dresse un bilan sans concession. « J’ai mené une vie toute remplie de hontes ». Et de son enfance dans une riche famille du nord du Japon à ses 27 ans, en passant par ses expériences tokyoïtes plus ou moins sordides, il décrit son inadaptation au monde.

De ses aspirations à devenir un grand artiste, dans le style occidental, très à la mode au Japon du début du XXè siècle à sa déchéance dans l’alcool, le shôchû coule à flot dans ces pages, et la drogue, Yôzô dresse un autoportrait implacable.

Emprunt d’un certain nihilisme, ce marginal hypersensible a beaucoup de ressemblances avec son créateur. Dans les ruptures successives qu’il opère, par exemple, avec son milieu d’origine puis avec le monde des hommes tout simplement. Dans sa fascination aussi pour la culture française.

Goodbye est un peu le contrepoint à cette descente aux enfers. Dazai y propose « de capturer ici divers instantanés de ce que peut être la séparation ». Et c’est sur le mode caricatural et drôlatique qu’il présente un séducteur invétéré, Tajima Soj. Dans un revirement moral aussi soudain qu’inattendu, ce jeune rédacteur en chef de la revue Obélisque décide de quitter une à une toutes ses maîtresses. C’est en effet un « homme à femmes » comme l’est Yôzô d’ailleurs et comme l’était Dazai !

Pour y parvenir il échafaude un plan rocambolesque dont le principal ressort sera une marchande ambulante aussi belle que repoussante ! Le texte est un régal d’humour grinçant qui accumule les saynètes ironiques. Au lecteur d’en imaginer la fin puisque dans une ultime rupture, Dazai a définitivement décidé de dire « goodbye ».

À découvrir ou redécouvrir dans une traduction qui donne toute sa grandeur à la sensibilité de son auteur, à la fois fragile et dérisoire mais aussi d’une grande noirceur.

Camille DOUZELET et Pierrick SAUZON

(1) Lire notre chronique de son antépénultième roman : https://asiexpo.fr/soleil-couchant-roman-japonais-dazai-osamu-nouvellement-edite-belles-lettres/

Déchéance d’un homme et Goodbye, Dazai Osamu, Les Belles Lettres, collection L’Exception, traduit et présenté par Didier Chiche, 224 pages, 23 €.

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