Kiyoshi Kurosawa est un cinéaste fascinant. A la fois reconnu comme auteur par la profession et la critique, il reste toutefois plus que jamais attaché au cinéma de genre auquel il apporte une rare densité.
Le coffret édité par Arte vidéo est donc le bienvenu car il montre en quatre films l’étendue de l’univers de son auteur. Un regret tout de même, l’édition de ces dvd reste la même que celle sortie des années auparavant, aucune nouveauté n’est donc proposée en termes de contenu.
Charisma (1999) semble être un versant mystique à l’immense Cure, le polar psychologique sorti deux ans auparavant et ayant fortement contribué à la reconnaissance de son réalisateur dans le monde. Koji Yakusho reprend donc un rôle de policier à la dérive à qui l’on demande de prendre quelques jours de congés suite à une prise d’otage ayant mal tourné. Il décide alors de se mettre au vert, part à la campagne et découvre une communauté se déchirant à cause d’un arbre étrange nommé Charisma. Kiyoshi Kurosawa va ici plus loin que Cure dans l’introspection, l’étrange et les changements de ton qui caractérisent son cinéma. Doucement, il injecte dans son métrage la problématique propre au policier : celui-ci avait voulu sauver à la fois le preneur et l’otage. Elle imprègne chaque instant de la pellicule. Etrange, mystique et contemplatif, Charisma représente un pendant moins accessible (mais pas moins intéressant) de la filmographie de son réalisateur.
Kairo, sorti l’année d’après reste à ce jour l’œuvre la plus ambitieuse de Kiyoshi Kurosawa et pourrait justifier à elle seule l’achat de ce coffret. Un informaticien faisant des recherches sur une plante étrange se suicide en laissant un message sur une disquette. Parallèlement un jeune étudiant voit sur ordinateur d’étranges images fantomatiques. Il semblerait que ce soit la cause d’un virus se propageant dans tout Tokyo et provoquant la disparition de ses habitants. Dans la forme, Kairo se rapproche du Ring d’Hideo Nakata. L’histoire se base sur un récit d’horreur, et les moments d’épouvante pure font preuve de la même économie de moyen et d’effet que son collègue. Pour autant, Kiyoshi Kurosawa n’abandonne pas son style, il développe en filigrane un discours sur la société nippone. Ce discours, associé à la multitude d’images et de scènes fortes fait de Kairo l’œuvre la plus cohérente et complète de son auteur. Fascinant.
Tourné un petit peu avant Kairo, Seance demeure le film le plus faible du lot – c’est en réalité un téléfilm vendu en France comme un film de cinéma -. Nous suivons l’histoire d’un couple dont la femme possédant des dons de médium est sollicitée pour résoudre une affaire de kidnapping. En soit le film reste du pur Kurosawa, les plans sont toujours autant chargés d’informations, le rythme prend son temps pour distiller une angoisse rampante. La similitude du thème avec Cure et Kairo, fait de Seance une sorte de brouillon de ce dernier dans lequel Kiyoshi Kurosawa semble expérimenter les effets horrifiques et la création d’une peur diffuse.
Jellyfish, date de 2003, et nous conte l’histoire de deux jeunes ouvriers japonais déçus par leur environnement de travail. L’un d’eux possède chez lui une méduse extrêmement venimeuse. Kurosawa laisse de côté les oripeaux du cinéma de genre pour se concentrer sur une multitude de thèmes : la remise en question du statut des nombreux personnages, l’aliénation sociale, la contestation ouvrière, la culpabilité… et donne une vision de la société japonaise globale, mise en scène avec un onirisme constant donnant lieu à quelques plans d’une très grande poésie.
Éditeur : ARTE Video
Pays : Japon